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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

Tic tac

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Au jour le jour

Mardi 12 août 2 12 /08 /Août 03:39
Un petit mot pour vous, avant que je ne m'en aille. Un petit mot pour un grand merci.
Merci de m'avoir ouvert les portes de votre chez-vous.
Merci pour ces soirées passées à papoter, pour les balades, les parties de plage, la sublime expo Van Gogh à la Cathédrale de l'image, les verres dans les bars à Marseille, tous ces repas, tous ces fous rires partagés.

Merci pour tout ça, avec une mention très spéciale au "Quiz Garçons" avec Ether : nous l'avons concocté à deux, très tard, sur un coin de canapé, en nous tordant de rire. Et ce soir-là, nous avons aussi revisité la langue française, tant et si bien que nous avons failli morturir d'étouflation.


Merci d'être qui vous êtes, les amis.
Je m'en vais en vous souhaitant le meilleur pour vos nouvelles vies à construire.
Ah, et puis... Je vous aime.

Très fort. Vraiment.



Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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Vendredi 8 août 5 08 /08 /Août 00:34

Tous les sudJe suis dans le sud.
Lorsque je suis descendue du train, mon sac de voyage sur l'épaule, j'ai aspiré une large bouffée. L'air était plus léger, plus piquant, mêlé de résine et de chaleur sèche.
J'ai levé les yeux.

Le bleu du ciel était également différent. Plus bleu, plus pur, plus intense. Un turquoise trempé de marine et délayé d'indigo.

Dans la vieille ville aujourd'hui, l
es filles, bronzées, portaient des robes courtes. Leurs longues jambes étaient des compas qui arpentaient le monde tandis mes talons butaient sur les pavés inégaux.
Clic, clac.
À une terrasse de café, j'ai allumé une cigarette, feuilleté un journal, rêvassé. Occupée à ne rien faire, si ce n'est à regarder le soleil descendre à la verticale des façades, allumant d'or leurs briques ocres.



Demain, ce sera la plage, les cris d'enfants, le sable brûlant, ses aspérités en aiguilles, le sel qui tire la peau.

La mer, la garrigue, les à-plats de lumière crue, la touffeur de l'aube, la timide fraîcheur du soir sur fond de vrombissements de moustiques et de bougies à la citronnelle... Ce sud-là, c'est tous mes sud.
Tous ceux de mon imaginaire et de mes étés d'enfance confondus en un seul, piqueté d'étoiles, embaumé de pins parasol, bercé du chant des cigales.

 

 

Pin-up de Gil Evgren.

Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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Lundi 14 juillet 1 14 /07 /Juil 23:19

La nuit, je mens.

J'entre dans des pièces inconnues, vastes comme mes songes. Il y a des couloirs profonds comme des entailles, des fenêtres en trompe-l'œil. Il y a de la lumière, de la musique, des rires et des paroles sans importance.
Ce sont mes là-bas alors que je suis ailleurs.


La nuit, je suis une chair é
parpillée en un seul bloc, un souffle qui murmure et se tait.

La nuit, je m'exténue pour mieux me reposer.

Puis je me réveille au matin dans ma vérité.
Je n'ai jamais pu faire semblant bien longtemps.

La nuit je mens
Je prends des trains
À travers la plaine
La nuit je mens,
Je m'en lave les mains.

J'ai dans les bottes
Des montagnes de questions
Où subsiste encore ton écho.
Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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Samedi 17 mai 6 17 /05 /Mai 03:35
Aujourd'hui, j'ai été fouillée. Fouaillée et sondée jusqu'aux os dans mes replis les plus intimes. Vessie, foie, pancréas, trompes...
M
es organes enfermés dans mon ventre ont aujourd'hui livré leur secret.

- Votre échographie n'est pas normale, m'avait prévenue le médecin il y a deux mois. Je vous prescris un scanner pour en avoir le cœur net.

Aussitôt, j'avais pris rendez-vous dans une clinique. Reçu une ordonnance en retour et m'étais conformée au traitement prescrit : au vu de mes antécédents allergiques, trois fois trois.
À savoir, trois cachets à prendre dans les trois jours précédant l'examen.

Sur les trois médicaments prescrits, j'en supportais bien deux. Le troisième m'expédiait
en revanche sur une autre planète.
Le lendemain de chaque prise, le réveil était une pure douleur. Je m'extirpais l'après-midi d'un coma la langue collée au palais, la tête lourde, le cerveau plongé dans du coton.
Tenace impression qu'un semi-remorque m'avait roulée dessus, en marche avant puis arrière.
Hébétée avant même de poser le pied à terre, engluée jusqu'au soir dans un shoot de mauvais trip.

- Pas grave, me disais-je. La vérité est à ce prix puisque dans deux jours... un jour... aujourd'hui... tu sauras.

Première erreur. À jeun depuis la veille, fracassée aux médocs, l'estomac débordant de sulfate de baryum (à boire une heure avant l'examen, histoire de clore les réjouissances), prête à dégueuler mes tripes sur le comptoir du bureau d'accueil, je n'ai pas su.
Leur scanner était tombé en panne quelques heures auparavant.
- Désolée madame, faut reprendre rendez-vous.
Écœurée, au bord des larmes, je n'avais pas eu la force d'ouvrir mon agenda. Juste celle de tourner les talons sans un mot et d'appeler une amie pour lui hurler :
- Leur putain de machine ne marche pas ! J'ai fait tout ce cirque pour rien et je ne suis même pas fixée !

Dix jours plus tard, aujourd'hui, je suis retournée à la clinique.
L'hôtesse qui m'accueille est aussi belle et noire qu'une statue d'ébène, version plus souriante.
- Asseyez-vous, on vous appellera dans cinq minutes, me dit-elle d'une voix chaleureuse.
J'obéis et attends mon tour. Résignée à faire le pied de grue une bonne demi-heure, car le délai qu'elle m'annonce, je n'y crois pas.

Deuxième erreur. À peine cinq minutes se sont-elles écoulées qu'on crie mon nom et qu'une autre déesse noire m'ouvre une porte.
Celle d'une petite cabine impersonnelle où elle me somme d'enlever mes chaussures, mon pantalon, mon soutien-gorge et mon collier.
Persuadée que l'imminence de l'examen dépend de ma rapidité, je m'exécute en un éclair.

Troisième erreur. À moitié nue, assise en petite culotte sur le siège de mon réduit, j'attends et entends le déroulé de l'examen en cours :
- Gonflez vos poumons. Ne respirez plus !
Les minutes coulent à une allure de fourmis. Celles qui envahissent mes jambes à mesure que la peur me tord le ventre.
- Dans cinq minutes... dans quatre... dans trois... tu sauras.
Mais soudain, je n'ai plus si envie de savoir. Surtout envie de m'enfuir pour me réfugier chez moi, loin de cet univers glacé de blouses blanches et de machines.

- Entrez, c'est à vous.
Je traverse la pièce pour me coucher sur mon lit de métal. Crucifiée toute droite, jambes allongées et bras tendus derrière la tête, une aiguille fichée au creux de la veine. Marionnette sectionnée soumise aux instruments qui me scrutent, je réponds aux mêmes ordres entendus précédemment :
- Gonflez vos poumons. Ne respirez plus !
Grand moment de solitude, bientôt rompu par l'intervention laconique du technicien :
- Je vous passe la perfusion. La sensation de chaleur que vous ressentirez est tout à fait normale.
Cela dit, il enclenche un bouton et s'éloigne.
Je regarde, fascinée, le poussoir de la machine appuyer sur l'ampoule. Et à mesure qu'elle se répand dans mon corps, je suffoque.
Une main brûlante m'étrangle. J'ai envie de hurler que j'étouffe, mais mes amygdales sont si serrées qu'aucun son ne sort de ma gorge compressée. Bientôt, la main enflamme mes poumons, mon ventre, mon sexe.
Je sens palpiter ses lèvres entre mes cuisses. Cernée par les parois étroites de la machine, j'ai l'impression que je vais crever là comme une chienne, consumée sur le bûcher de l'Inquisition médicale, scrutée par l'œil indifférent de la machine.
- Respirez !
Mon corps démembré n'est plus chair, il n'est qu'organes.

Je respire. Me lève, me rhabille, repasse dans la salle d'attente.
Affamée, assoiffée, je mange et bois enfin.
À côté de moi, une jolie fillette aux yeux bruns regarde avec envie mon paquet de gâteaux. Après avoir demandé la permission à son papa, je lui en donne la moitié. Me réjouis de la voir la dévorer à belles dents, le cœur chaviré à la pensée de l'enfant que je n'aurai peut-être jamais.

Mais voici qu'on m'appelle à nouveau. La femme médecin qui me reçoit a les lèvres pleines et le diagnostic sûr :
- Vous êtes touchée des deux côtés.
Je regarde l'écran qu'elle me désigne, reconnais juste le trajet cambré de ma colonne vertébrale. Le reste s'éparpille en images que je ne comprends pas : un amas de formes indistinctes en dominantes de gris, contrastées du blanc au noir.
Un reste qui ne peut pas être à moi. Que je renie.
Impossible,
ce que je vois là n'est pas mon ventre découpé en tranches.
Pas mon ventre, i
l y a erreur. Une de plus à ajouter à la longue liste des autres. Celles de ce fichu examen repoussé à cause d'une panne stupide, celles de la vie tout court.

Les images se télescopent sous mon crâne alors que le médecin
répète doucement, comme pour m'ancrer ses mots dans la tête :
- Vous êtes touchée des deux côtés.
De grosses larmes roulent sur mes joues.
Désarçonnée, compatissante, elle ajoute par dessus ses lunettes :
- Rien n'est joué, vous savez... Mon rôle ne se borne qu'à lire les images et avec les moyens actuels, vous avez de nombreuses possibilités pour avoir un jour un enfant.

Nombreuses, peut-être. N'empêche qu'elles se résument pour l'instant à une opération.
En une heure, voilà mes perspectives de vie chamboulées.
Je croyais avoir encore du temps pour tout, je n'en ai peut-être plus beaucoup.
Et au fond de moi, des questions obsédantes, torturantes que je repousse : et nous ? Et lui ?

Il paraît que tout arrive à point pour qui sait attendre.
Ben non. Parfois, tout arrive trop tôt.
Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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Lundi 12 mai 1 12 /05 /Mai 05:26
Vrille
BOT. Organe de fixation filiforme de certaines plantes grimpantes, s'enroulant en hélice, en spirale autour d'un support.
TECHNOL. Outil formé d'une tige métallique munie d'un manche et terminée par une vis, servant à percer le bois.
AVIAT. Mouvement, figure d'acrobatie d'un avion qui descend en tournant sur lui-même.
NATATION Plongeon du tremplin qui comporte le saut carpé, puis la torsion en se dépliant.

Non, ce n'est pas ça, la vrille.
La vrille, c'est avoir un poignard dans le cerveau et des clous dans les orbites.

La vrille, c'est fermer les yeux et voir les morts. Puis les ouvrir et voir morts les vivants.
Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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Lundi 7 avril 1 07 /04 /Avr 02:33

Solitude-copie-1.pngLa solitude...
Avec ses airs d'ennui, de face à face contraint avec soi-même, de désert sans présence pour l'habiter, elle effraie beaucoup de gens. Elle sonne creux, inutile, comme un vide à remplir de toute urgence ou une épine dans le pied à s'arracher... quitte à se couper le pied.

Mon père, par exemple, fait partie de cette catégorie. La solitude, plus que pénible, lui est insupportable. Pour se sentir vivre (vivant ?), il a besoin de témoins, d'yeux qui le regardent et d'oreilles qui l'écoutent, même s'il radote. Et quand il n'y a personne alentour, il lui reste ses dévoués compagnons attachés à ses traces. Si fidèles qu'a-t-il lâché en plein dîner, sous forme de "boutade", c'est eux qu'il remercierait sur sa pierre tombale.
Son épitaphe ?
Il fut aimé de ses chiens.
No comment, même pas drôle.

Bref. N'avoir rien à faire, pas âme qui vive à voir, ça le panique. Du coup, il passe son temps à le remplir, multipliant les loisirs, remplissant son agenda à ras-bord. Le moindre trou est une angoisse, un blanc à affronter, la perspective d'un horrible moment à passer dans le huis-clos de son cerveau.
L'enfer n'est pas les autres pour tout le monde.
Pour certains, l'enfer, c'est soi-même.

Moi, au contraire, j'aime me retrouver seule. Pour me ressourcer, j'en ai même besoin.
Le tourbillon des sorties, des multiples rendez-vous, des activités qui s'enchaînent me fatigue vite. À peine m'a-t-il happée que j'ai envie de me retrouver chez moi, au calme, téléphone coupé. Dans une bulle de musique, plongée dans un bouquin ou un film, occupée à écrire ou à rêver, sans avoir à parler ni à faire d'efforts.
J'ai beau être sociable, je tiens au fond de l'ermite retranché dans sa cellule, replié dans son antre, en-deçà du monde réel.
Le mien, intérieur, me suffit. D'autant de mon ermitage, je peux en sortir quand il me plaît, puisque j'ai les clés.

Mais la solitude qui m'habite en ce moment, surtout depuis mon retour de "là-bas", n'a rien à voir avec ça.
C'est un sentiment, ou plutôt un état, ni agréable, ni désiré. Loin de m'apaiser, il m'écorche, me laisse à nu, désemparée, me fait monter des boules d'angoisse dans la gorge, me plie en deux par surprise.
Je voudrais le fuir ou, à défaut, négocier afin qu'il me fiche la paix. Parce que lui tordre le cou, j'ai beau essayer, je n'y arrive pas...

Pourtant, y a des heures où ça va : l'ennemi, sous contrôle, se tait et reste tellement discret que je crois en être débarrassé.
Erreur : il s'est caché pour mieux revenir en traître.
Là, ça ne va plus du tout. Je n'ai plus l'impression d'être seule, j'en ai la certitude. Et je me sens petite, si petite, écrabouillée quelque part entre le mur et le canapé. Étrangère au monde, à tout le monde, à commencer par moi-même, remplie de larmes, d'aiguilles, d'échardes et de chardons.

Je ramperais pour un peu de douceur, de bienveillance et de tendresse. Pour m'allonger tout contre l'homme que j'aime et nicher ma tête au creux de son épaule. Pour qu'il m'entoure de ses bras et passe sa main dans mes cheveux. Même pas besoin de parler. Juste sentir sa présence.

S'il n'y avait qu'un mot pour décrire ce que je ressens, ce serait orpheline.

Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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Mercredi 2 avril 3 02 /04 /Avr 02:44

Il est néJe ne sais pas par où commencer cet article. J'ai essayé plusieurs amorces, mais aucune ne convient. Je sais le centre, je le ressens encore dans mes tripes, mais pour qu'il soit compréhensible, il faudrait dire la périphérie. Expliquer les chemins à la fois simples et tortueux qui y mènent. Dépiauter l'oignon de ses peaux protectrices pour arriver au cœur et le mettre à nu.

Retracer, expliquer est long travail qui me fatigue d'avance. Et je ne suis pas sûre d'être au clair avec moi-même, ou tout simplement claire, tant ces trois jours dans mon là-bas ont déjà été denses et épuisants.
La fatigue physique n'est rien. C'est émotionnellement que je suis vidée. Et encore, entre cette journée et maintenant, il y a eu une soirée avec l'amie d'enfance qui m'accueille.
Une bonne soirée, mais une soirée dure aussi, à parler sans détours ni faux-semblants. Pas le genre de soirée qu'on oublie de sitôt.

N'empêche que je ne sais toujours pas par où commencer.
Je pourrais dire que j'ai été confrontée, que j'ai vu
, sans transition autre qu'un bref trajet en voiture, les deux extrêmes de la vie, mais en inversé : la maison de retraite où des "vieux" finissent leur existence, puis l'aile de la maternité où la fille de ma belle-mère, une sœur de cœur, vient d'accoucher.

Mais ce serait présenter les événements d'une trop jolie façon. Les situer dans une perspective littéraire, romancée de la vie qui est un perpétuel recommencement.
On naît pour mourir un jour... Tout le monde est au courant, même si bien peu de gens vivent avec cette idée, sauf pour l'oublier.
Penser que l'on là est juste en visite, de passage, et qu'on finira par crever en laissant si peu derrière soi. Qu'on occupe juste une tranche de rien à l'échelle du temps, et que nous revient la tâche (la responsabilité ?) de la remplir au mieux, d'en profiter ne serait-ce qu'un peu, malgré le balbutiement des jours qui n'ont pas de sens, des épreuves qui nous tombent sur les épaules... et heureusement, du plaisir, des plaisirs, parfois minuscules, parfois si intenses qu'on voudrait bien une âme et un cœur de rechange pour les accueillir tellement ils sont forts, violents.

Mais moi, je n'ai pas vécu cette journée de façon jolie ni littéraire. Je m'en suis mangé la seconde partie en pleine face, parce que je ne m'y attendais pas.
La lente descente vers la mort de ma grand-mère, je l'accepte par la force des choses. Je sais que chaque visite sera une épreuve, alors j'y travaille avant. Ce qui ne la rend pas facile, loin de là...
Au moins, je m'y prépare, à défaut d'être prête.

En revanche, je n'étais pas préparée du tout à la vision de la maternité. Ou plutôt à ce qu'elle allait soulever en moi, à ce raz-de-marée de larmes complètement inapproprié à la situation.
Lorsque je suis arrivée dans la chambre avec ma belle-mère, tout allait bien. J., le papa était là, tout fier, adorable comme leur enfant qu'il tenait dans les bras.
On était contents de se voir, on a papoté, j'ai offert à la jeune maman quelques babioles pour elle et le petit.

Jusque-là, rien à signaler. C'est lorsque les parents de J. sont arrivés que j'ai commencé à me sentir bizarre.
Au début, je n'ai pas compris.
Au moment où la mère de J. s'est penchée sur l'enfant, quelque chose a chaviré en moi. Une dame blonde, aux yeux très bleus, avec un amour si éclatant, inconditionnel, sur le visage...
Soudain, comme en surimpression, j'ai vu ma mère. Et dans cet enfant, celui
auquel elle aurait souhaité donner tout cet amour, mais qu'elle ne prendrait jamais dans ses bras si j'en ai un jour, qu'elle ne verrait jamais grandir ; et de son côté à lui, l'enfant qui n'aurait jamais la chance de la connaître, de l'embrasser, de l'aimer, de la faire même tourner en bourrique, d'apprécier quelle femme elle était.
Cette joie que nous aurions pu partager ensemble si elle avait été là, simplement.

Il est né 2Mon cœur s'est déchiré en mille morceaux.
Je me suis levée brusquement pour me précipiter dans la salle de bains. Me suis baigné le visage à l'eau froide
en réprimant les sanglots qui m'étouffaient. Ai fait le plus de bruit possible avec le robinet, le séchoir pour que surtout, personne ne m'entende.
L'heure était à la réjouissance, pas à la peine. Cette souffrance est la mienne, la déverser sur une maman qui vient de mettre son enfant au monde aurait été indécent.
Qu'y pouvait-elle, elle ? Rien.

J'avais beau essayer de me reprendre, c'était de pire en pire. Alors je suis sortie pleurer dans le couloir, longtemps, recroquevillée sur moi-même, la tête contre les vitres de la verrière, les mains pressées contre la bouche.
Ma belle-mère, venue me rejoindre, a essayé de me consoler. Mais parfois, malgré toute la bienveillance du monde, la consolation est juste impossible à trouver, parce que ce qui se joue est tellement au-delà des mots qu'aucun mot ne peut l'atteindre.

Puis je me suis calmée.

Puis je suis rentrée, seule.
Puis j'ai envoyé un petit mot à l'homme que j'aime.
Puis j'ai repensé à ce bout de chou dans ses langes.
Et puis j'ai eu envie de lui dire ce dont j'avais été incapable dans cette chambre :
"Bienvenue dans ce monde-là, aussi formidable que cruel parfois, en espérant que tu y sois heureux. Tu as deux parents formidables pour veiller sur toi.
C'est déjà un bon départ dans la vie, non ?"

Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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