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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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Classé X

Dimanche 18 octobre 7 18 /10 /Oct 03:00

Welles saisit le poignet droit de Laïs et le leva vers une menotte. Lorsque le cuir mordit sa peau, elle cria de surprise.
À la seconde morsure, ce fut une plainte étouffée, mélange d'appréhension et de plaisir qui la clouait là,
oiseau pris au piège, soulevant sa poitrine par saccades.

Hormis cette pulsation à peine visible sous la veste, Laïs ne bougeait pas. Concentrée et comme absente, repliée en elle-même mais attentive au moindre son, elle tentait de percer le mystère que lui dérobait le bandeau.
Où se trouvait-elle ?
Qui était là ?
Combien de personnes l'entouraient ?

D'un signe, Adrien m'ordonna de m'avancer. J'obéis en me demandant comment un homme toucherait une belle femme offerte. D'un contact franc et appuyé ou légèrement, à petites touches ?
Je pensai à mes amants puis à ces scènes entrevues dans un club libertin.
À l'empressement des mâles avides de chair, à leurs gestes durs, précis, exigeants. À cette folie qui les emportait, volontaires et crispés alors que leurs fesses luisaient sous la lumière.

Enserrant les hanches de Laïs, je les comprimai jusqu'aux os, cheminai à rebours le long de ses reins, contournai ses fesses et pinçai ses cuisses.
Elle gémit.
Un pas en arrière et je déboutonnai sa veste. Le
décolleté de sa robe apparut, si profond que son soutien-gorge se détachait, rouge sang, sur sa peau blanche. Ses seins formaient deux montagnes jumelles séparées par un vallon. Je humai son parfum, vanille et sueur, avant d'y glisser mon menton, ma bouche, ma langue.

Welles entra dans notre danse. I
l épousa d'une enjambée la courbe de son échine, avançant, reculant sans la toucher au rythme de ses oscillations. Lorsqu'il posa une paume sur sa taille, Laïs, comme cabrée sous la mèche d'un fouet, sursauta.
Qui était là ?
Adrien, se faufilant entre nous, glissa ses mains sur ses côtes.
Combien de personnes l'entouraient ?
La tête de Laïs tournait.
Entre
tous ces doigts qui s'enhardissaient, s'immisçaient sous ses vêtements, couraient le long de ses mollets et remontaient à son soutien-gorge, le tirant, l'abaissant, le dégrafant pour en faire poindre, sourdre, jaillir les tétons, elle perdait le compte.
Compte perdu comme celui des bouches, des dents, des langues qui
l'embrassaient, la léchotaient, la mordillaient, habillée mais déjà nue, flageolante et debout, lèvres mordues au sang.

Adrien
remonta sa robe sur son bassin.
Les bas coupaient d'une rayure sombre ses cuisses charnues. Au-dessus de la jarretière s'ourlait un renflement adorable, enchaîné en pente douce à ses fesses imposantes.

Laïs n'était pas une femme. Elle était la femme dans sa splendeur, l'amante, l'épouse et la mère au bassin triomphant, la divinité fertile des moissons du plaisir.
Lové entre son entrejambe se dessinait le triangle d'un tissu humide. J'y égarai mes doigts, les retirai pour les porter à mon visage, les sentir, les lécher, résistant à l'envie de m'agenouiller pour la boire.

Le temps de redevenir femme avait sonné.
Je m'éclipsai pour me dépouiller de ma chemise et de mon pantalon,
détachai mes cheveux, me parfumai et enfilai une paire d'escarpins. Revenant au salon, je les fis à dessein claquer sur le parquet.
Un frisson secoua Laïs de haut en bas.
Combien de personnes l'entouraient ?

Ployée sous les caresses des deux hommes, jambes écartées, robe rabattue sur les épaules, bas plissés sur les chaussures, elle était plus nue que nue.
S'apercevait-elle
seulement de son impudeur ?
Protégée par le voile de la cécité, e
lle aurait pu s'en effrayer ou en jouir, au moins autant que nous qui jouissions de la voir rendue sans réserves à notre pouvoir.

Par Chut ! - Publié dans : Classé X
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Samedi 17 octobre 6 17 /10 /Oct 01:18
Adrien voulait offrir un cadeau à Laïs, son épouse. Mais ni parfum, ni lingerie, ni sortie au théâtre ni voyage. Pour elle, il désirait le plus beau cadeau qu'un homme puisse faire à une femme : une après-midi de plaisir. De plaisir oui, mais plus encore : une plongée dans le cœur forcément trouble de ses fantasmes.
Offrir à l'autre ce qu'il n'a jamais osé demander ni ne se formule à lui-même, n'est-ce pas, tout compte fait, la plus belle preuve d'amour ?

La préparation de ce plaisir prit du temps et trois personnes : Adrien lui-même, Welles et moi.
Je n'avais jamais vu Welles. Laïs non plus, alors même qu'il s'approchait d'elle.
Il ne prit ni la peine de s'annoncer ni celle de la saluer. Ces politesses étaient inutiles, il le savait. Aussi, arrivé tout près d'elle, jusqu'à la toucher, lui glissa-t-il le bras sous le coude pour lui chuchoter :
- Bonjour, belle dame.
Laïs dut sursauter, tourner la tête et peut-être lui sourire.
Ce sourire n'était pas adressé à Welles mais au noir. Laïs,
un masque opaque d'avion glissé sous ses lunettes de soleil, était aveugle.

Welles la guida pas à pas dans les rues.
Laïs avait
confiance, forcément. Sinon, elle aurait arraché pour s'enfuir ce qui lui obstruait les yeux.
Elle avait peur,
aussi. Du moins je le crois. Quelle femme ne tremblerait pas de se confier ainsi à un parfait inconnu ?
Côte à côte, elle sûrement un peu tremblante et lui penché sur elle, ils cheminaient vers le plaisir. C'est-à-dire vers mon appartement.

Le couloir et le salon, dégagés de leurs meubles, n'offraient plus aucun obstacle. Un grand tapis donnait du moelleux au plancher trop froid, signe d'un printemps qui titubait encore dans l'hiver. Adrien sur le canapé avait la mine concentrée de ceux qui se repassent un film à créer.
Il était
prêt, moi non. Au dernier moment j'avais trouvé ma tenue de femme-garçon : une chemise et un pantalon enfilés sur une robe courte à fines bretelles.
Mes cheveux étaient retenus par un élastique, m
es jambes et mes pieds nus. Laïs ne devait ni deviner que j'étais une femme, ni m'entendre marcher.

Un coup bref, un coup long à l'interphone. C'était le signal.
Je déverrouillai
le sas de l'immeuble sans un mot. Laïs ne devait pas entendre ma voix. Elle aurait pu la reconnaître.
Traversant le couloir à pas de loup, j'entrebâillai ma porte et écoutai. Le silence d'abord. Puis, très vite, le frôlement d'une main sur la rampe d'escalier et un bruit hésitant, inégal, chancelant de talons. Ceux d'une femme qu'on aurait dit ivre et surtout seule.

Lentement l'écho montait, montait, plus fort, plus précis, plus synchrone avec celui qui résonnait sous ma chemise, gonflant le tissu, tirant sur les boutons.
Bientôt surgirent des marches une chevelure dénouée doublée d'une houppette poivre et sel.

Ils étaient sur le palier.

Laïs avait le menton porté un peu trop haut des aveugles, les gestes imprécis sous l'armure du manteau, la courbe bouleversante du cou battant contre l'écharpe. L'ovale de son visage et sa bouche fine étaient aussi beaux que dans mon souvenir.
Welles avait un visage que l'on aurait pu oublier si ses yeux n'étaient pas si vifs. Deux pointes noisettes déchiffrant le message tracé par Adrien :
Bande-lui les yeux.
Attache-lui les mains.

Saisissant l'épais foulard que je lui tendais, il ôta les lunettes de sa captive pour le nouer autour de son masque.
Laïs ne verrait rien. Pas même le ballet de nos bustes, de nos jambes, de nos pieds autour d'elle.

Welles l'escorta jusqu'aux crochets fixés à la poutre du salon. Laïs frémissait déjà de ce qu'elle ne voyait pas : une corde soutenant une barre prolongée de menottes.
Gibet de plaisir sur lequel elle serait crucifiée.

Dépouillée de son manteau, elle se tenait debout en émouvante statue de chair. Sage dans
sa robe grise aux genoux et sa veste boutonnée aux clavicules, avec en contrepoint ses bas filant sous ses escarpins rouges.


Par Chut ! - Publié dans : Classé X - Communauté : xFantasmesx
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Mercredi 12 août 3 12 /08 /Août 01:32
- Même pas cap' de le faire, me défia Jason.
- Si, rétorquai-je en avançant le menton, signe que j'avais été piquée.
Il leva les yeux au plafond, bras écartés, bouche ouverte. Posture convenue du communiant qu'
au catéchisme, baptêmes, messes et confesses sa famille l'avait souvent forcé à adopter.
Je lui demandais s'il communiait avec les étoiles en plein jour, et même pas un dimanche.

Il me gratifia d'un rire narquois.
- Je ne te crois pas, de toute façon.
Trop occupée à défaire les boutons de ma chemise, la boucle de ma ceinture, les lacets de mes baskets, je ne lui répondis pas.
- Ah ah ah aa....
Son rire se brisa alors que je dressai nue devant lui.
- Mais... ?
Je m'allongeai sur le tapis du salon. La surprise le fit choir dans le canapé.

- Tu ne vas quand même pas ?
Mes mains serpentèrent de mes seins à flancs puis à mon sexe. Lentement, doucement, furieusement, je me masturbais.
Jason ne parlait plus. Sa respiration oppressée s'était tue. Ou, trop absorbée par ma tâche, je ne l'entendais plus.

Je jouis. Et lorsqu'ouvrant les yeux, je tournai la tête vers le canapé, il était vide.
Au beau milieu de mon plaisir, il m'avait abandonnée.

Nous avions 20 ans.
Par Chut ! - Publié dans : Classé X - Communauté : xFantasmesx
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Vendredi 23 janvier 5 23 /01 /Jan 21:32

Il y avait un homme un peu gras, au torse velu orné de chaînes lui pendant jusqu'au nombril.
Un aux jambes athlétiques moulées dans un pantalon de cuir, les cils raidis de rimmel, les paupières soulignées au crayon.
Un autre encore, petit et mince, arborant perruque et diadème. Ses ongles vernis voltigeaient sur sa jupe lorsqu'il me glissa :
- Je suis Sissi. Voulez-vous jouer avec moi ?
Je songeai dans un sourire que de l'homme à la femme, le pas n'est parfois qu'un saut de puce.

Il y avait aussi des femmes, de très jolies femmes.
Une, taille étranglée dans un corset, avait le port d'une reine et la chevelure vaporeuse des sirènes. Son visage était celui d'une intouchable madone qu'on ne pouvait qu'adorer à genoux.
Une autre avait de longues jambes et des seins somptueux
sous la résille, ronds et fermes comme les pommes du péché. Ses mamelons dressés soulevaient les croisillons du tissu pour mieux poindre entre les mailles.
A
ppuyée contre un mur, elle s'offrait à la fessée.
À
mesure des claques sa croupe rosissait puis rougissait, tandis que de ses lèvres s'échappaient des plaintes de plus en plus aiguës. Elles devinrent mélopée lorsqu'un homme lui cravacha la peau.
Entre les paumes et la badine ses fesses tanguaient, roulis de plaisir emmêlé à sa chevelure que ses doigts fous agrippaient, tiraient, arrachaient.
La regardant, je pensai que c'était ça, l'extase :
des coups en battements de cœur, une tachycardie du désir, un délire de chairs moites haletant au rythme d'un tambour. Tour à tour caressante et pressée, furtive et appuyée, la cadence alternée des mains et de l'instrument épousait les entrelacs de sa jouissance.

Y avait-il de la musique ? Je ne m'en souviens plus tant j'écoutais le battement des corps qui m'entouraient. Les gémissements de ma voisine renversée en levrette, les plaintes d'un soumis piétiné sous les talons des bottes, les râles d'un soumis à quatre pattes, fouetté par deux Maîtresses.
Ce concert de cris et de soupirs était la mélodie interlope de la vie, aussi enivrante que mon whisky-coca. J'étais bien là, un peu grise, à observer le manège du désir qui tournait vite, de plus en plus vite.


Lorsque je reposai mon verre, il y eut un bref silence. Puis, tranchant le silence, une voix qui me souffla :

- Vous êtes dramatiquement belle.
Sensible comme je le suis à la tragédie, c'est l'adverbe qui me fit me tourner.

Une miniature de princesse s'était coulée à mes côtés sur le canapé. Elle avait les rondeurs des très jeunes femmes, un minois de petit chat aux lèvres charnues et aux grands yeux sombres, de courtes boucles rebiquant sur ses joues pâles.

- Je m'appelle Anaïs.
- Bonsoir, Anaïs.
Aucun autre mot n'était nécessaire pour l'enlacer, prendre sa bouche, enrouler ma langue à la sienne.
Les femmes ont entre elles des baisers encore plus doux que ceux qu'elles donnent aux hommes. Et ce fut cette douceur partagée qui me fit chavirer vers sa gorge, écarter son soutien-gorge pour lécher ses seins lourds et tendres.
- J'ai envie de toi, murmurai-je.
- Mais je suis en pantalon...

L'obstacle annoncé n'en était pas un. D'un seul geste, je dézippai sa combinaison jusqu'à ses cuisses. Lentement apparurent, albâtres dans la pénombre, sa poitrine généreuse, son ventre bombé, son nombril adorable, ses hanches de contrebasse et sa petite chatte épilée.
Anaïs, fraîche comme la rosée, avait la saisissante candeur des Vestales.

Les genoux à même le béton,
je m'agenouillai comme on prie entre ses cuisses écartées, les mordillai en remontant paresseusement vers son sexe. Offerte sur le canapé, Anaïs me cachait son visage. Pourtant, je sentais son trouble aux crispations de ses doigts serrés sur mon front, glissés entre mes cheveux.
Notre amour fut d'abord à l'aveugle. D
ans l'obscurité j'avançais, guidée par la boussole de mes sensations, reliée aux siennes par un fil invisible.
Je m'inclinai pour
lécher sa vulve lisse. Anaïs ouvrit davantage les jambes pour m'offrir son sexe. Et j'y plongeai de la langue au menton, aspirant ses lèvres, titillant son clitoris.
Ses hanches s'agitaient de soubresauts. Je les forçai à rester immobiles pour introduire un doigt, puis deux, en elle.

Anaïs se redressa. Son visage ne tenait plus de la Vestale mais du démon.
- Encore... Plus fort... Je t'en prie...

Mes deux doigts coulissaient dans sa gangue chaude. Un troisième, aussitôt trempé de cyprine, les y rejoint.
- Fais-moi mal... Je t'en... supplie... Fais-moi mal !
Ma main tout entière la pénétra.
Ce fut un nid lové autour de mon poing serré. Un nid brûlant et moite qui brutalement, me fit retourner à la matrice, à la vie même. Et je contemplais, fascinée, mon poignet sortant de ces doubles replis.
- Oui... Ouiii !
Anaïs cria très fort. Lorsqu'elle retomba sur moi telle une poupée de chiffons, je retirai lentement ma main.
Sur le canapé, nous nous serrâmes l'une contre l'autre.

Faire l'amour avec une autre femme est pour moi un double jeu. De plaisirs et de miroirs, car son corps, c'est aussi le mien.



Dessins de Damien MacDonald.
Par Chut ! - Publié dans : Classé X - Communauté : xFantasmesx
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Jeudi 8 janvier 4 08 /01 /Jan 02:27
Dans cet appartement, c'était ma chambre que je préférais. Elle était au bout du couloir, vaste et blanche. Son parquet ancien couinait sous mes pas lorsque je la traversais. Jamais je n'ai su les lattes à éviter pour rejoindre mon lit sans bruit. Lit est toutefois un bien grand mot pour un matelas posé à même le sol.

Sur la porte, côté couloir, j'avais punaisé un de mes dessins, un entonnoir rouge suivi d'un texte griffonné :
"Ceci n'est pas un entonnoir pour les fous, c'est ma couronne", histoire de donner le ton.

La porte-fenêtre donnait sur un balcon où j'allais peu. Trop petit, trop bruyant à cause du boulevard en contrebas, il n'était guère propice à la rêverie. Les branches des marronniers découpées sur le ciel l'étaient, elles. Au moins autant que les lourdes tentures suspendues devant les vitres.
Elles étaient pourpres comme les rideaux de théâtre, d'une couleur si profonde qu'elle en éclaboussait les murs. Lorsque je les fermais, de jour comme de nuit la chambre devenait mon cabaret intime.

D'une représentation à l'autre, le spectacle changeait mais sa trame ne variait pas. Au point de dentelle ou de croix, toujours les broderies composaient le même motif : une étreinte clandestine.

J'imaginais par exemple une aube frisquette, un manteau trop mince sur mes épaules et assez de temps pour un café avant de prendre le métro.
Dans la rue se tient un bar-hôtel de quartier. Sa porte qui tinte quand on la pousse, ses tables usées avec leur cendrier en plastique, son sol douteux, son comptoir avec le patron servant des canons aux habitués.
Au fond de la salle, un escalier sombre mène aux chambres du premier étage. Séparées par des cloisons en papier cigarette, elles sont petites et sans confort, juste pourvues d'un lit et d'un lavabo.

Mille fois je suis passée devant ce troquet sans m'attarder. Aujourd'hui, j'entre parce qu'il y fait chaud, qu'il y a du bruit, des conversations, de la vie.
Debout derrière le zinc, je commande un double express. Plisse le nez à cause de la fumée des cigarettes. L'odeur du tabac au petit matin m'a toujours donné mal au cœur.
Le bourdonnement des mots sans importance m'entoure comme de la ouate. Je défais un à un les boutons de mon manteau, tire sur mon écharpe pour délivrer mon cou.

La boisson arrive, brûlante. Un filet a débordé de la tasse et mouillé le sucre. Je le repousse sur le bord de la soucoupe. Et à ce moment précis, je le vois.
Il est à l'autre bout du comptoir, penché sur son marc de café comme pour y lire son destin. Les épaules voûtées sous le poids de la journée à venir, les cheveux encore mouillés de la douche mais gominés.
C'est un homme banal en costume. Un employé ou un représentant de commerce dans la trentaine, ni grand ni petit, ni beau ni laid, sans rien qui accroche.
Le genre d'homme qu'on croise à tous les coins de rue sans se retourner.
Pourtant, ma gorge palpite soudain plus fort. Peut-être parce que dans ce rade d'habitués, nous sommes tous deux aussi décalés.

Mon regard insistant lui fait lever la tête. Puis, imperceptiblement, sa tasse, comme s'il trinquait avec moi en secret.
Nous savons dès lors ce qui va se passer, et nous voulons que ça se passe.
Les clefs des chambres sont accrochées sur un panneau de bois. L'homme, posant un billet sur le comptoir, en demande une au patron. Puis il traverse la salle, se dirige vers l'escalier, ralentit en passant à mes côtés, la clef en évidence dans sa paume.
Un battement de cils.
Oui, j'ai bien vu le numéro de la chambre.
J'avale mon café à la hâte.

Le battant de la chambre est entrouvert. À peine ai-je pesé sur la porte que l'homme m'attrape par la manche et me tire à l'intérieur.
Je la referme d'un coup de pied, me débarrasse de mon manteau. Alors que je dégrafe ma jupe, il m'arrête pour la remonter sur mes fesses. Ses gestes durs et précis me tournent, me collent au mur, baissent ma culotte.
Il ouvre sa braguette, enfile un préservatif et me prend debout, vite, fort, sans tendresse.

Chaque va-et-vient me fait gémir. Lui, il ne gémit pas, il grogne à râles étouffés dans mon cou.
Une crispation de son sexe m'annonce qu'il va jouir. Alors je viens, là, maintenant, avant lui, mon écharpe rentrée entre les dents.
Nous nous séparons les jambes molles.
 
Après m'être rajustée, je sors de la chambre sans un mot. L'homme la quittera aussi, mais plus tard, quand la rue m'aura happée.
Je descends l'escalier. Le brouhaha des rires et des discussions m'enveloppe de nouveau.
Le patron me dit :
- À bientôt, Mademoiselle.
Je souris en lui laissant un pourboire.

Neuf heures. Il est temps de m'engouffrer dans le métro. Je suis à peine en retard.
C'est une belle journée qui commence.


Photo : La Petite Mort, de William Santillo.
Image extraite des Chroniques de la Lune Noire (dessinateurs : Olivier Ledroit et Cyril Pontet).
Par Chut ! - Publié dans : Classé X - Communauté : xFantasmesx
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Dimanche 4 janvier 7 04 /01 /Jan 02:20

Sous le tissu la peau 2J'aime imaginer comment les hommes font l'amour. Qu'ils me plaisent ou non, j'ai lorsqu'ils me parlent des images qui me traversent, et dans les yeux la transparence de mes pensées.

Ils me demandent si je les écoute ? J'acquiesce alors que je suis ailleurs, écrasée sous leur poids contre le sommier, roulée par leur poigne entre les draps, râlant mon plaisir comme une bête qu'on égorge. Haletant de dégoût parfois, les narines emplies de leur odeur âcre, fouaillée par leurs ongles sales, détournant la tête dans un dernier coup de reins qui les fera jouir.

Il est des hommes que je rêve d'asservir alors qu'ils enfilent des banalités.
- Vous avez raison, le temps s'est rafraîchi.
Mon ton est à ces mots aussi pénétré que leur cul qu'ils me tendent, basculés à quatre pattes, nuque raidie d'angoisse, poignets et chevilles entravés.
Encore une protestation et j'abattrai une main sur leurs fesses molles, leur rentrant de l'autre la bourre des oreillers entre les dents. Puis saisissant leurs cheveux à pleines paumes, j'ordonnerai :
- Crache.
Complétant à part moi, à voix haute peut-être :
- Crache ton désir comme ta honte, dans un hurlement ou un souffle. L'abdication que tu viens chercher, je ne te la donne pas, je te l'arrache. C'est bien ce que tu veux, n'est-ce pas ? Ensuite, à genoux tu baiseras mes doigts entrés dans ta chair. Ces doigts souillés de toi, suintant toi, sortis de toi mais y rentrant à nouveau, de ton cul à ta bouche et de ta bouche à ton cul.

Il est aussi des hommes auxquels je rêve de me rendre. Mais pour qu'à mon tour j'abdique encore faut-il me faire plier. À moins que, bonne fille, je ne me livre avec le mode d'emploi, fermant deux mains rétives sur ma chevelure, joignant mes poignets dans mon dos en une invitation muette.
- Serre-les, bloque-les, soumets-moi. Fous-moi ta gentillesse à fond de gorge et ta tendresse au cul ou garde-les pour après. Après le plaisir où je serai fragile, friable comme de la porcelaine entre tes paumes.

Souvent, lorsque des hommes me parlent les yeux dans les yeux, les miens s'échappent malgré moi des leurs, descendent à leur cou et à leur chemise.
Sous les boutons fermés j'imagine la toison moutonnant sur leur poitrine. Ou, au contraire, leur torse imberbe aux tétons rétractiles.
Sous la ceinture
leur nombril en faille sismique, leur ventre tendu de muscles ou enrobé de chair à pétrir.
Sous le pli de leur pantalon, leur sexe rangé dans leur caleçon, marquant leurs cuisses d'un cercle imperceptible.

Sous le tissu la peau 1Sous ces gangues de tissu superflu se tient le cœur. Celui de la peau dure, de la peau douce
qui répond en écho à la mienne car nous sommes du même bois, du même sang, de la même glaise.

J'aime quand, tel un aveu sous l'enveloppe, le pli impeccable de l'étoffe s'altère d'un renflement.
Instant fugace de mise à nu du désir où se fissurent les faux-semblants.
- Je te désire.
- Moi aussi.

Sous l'homme soudain apparaît le petit garçon. Et parfois sous le petit garçon apparaît l'homme.

J'aime cet imprévu en prélude à la séquence des corps, comme j'aime ce qui accroche, ce qui tangue et ripe pour mieux défaire le mécanisme bien huilé du coït.
Dans le cul comme ailleurs, ce n'est pas l'assurance de la plénitude que je recherche mais la faille, la fêlure, la lézarde.

Ce petit truc en moins de l'avis des autres, qui est un plus au mien. Pour moi le lisse est trop plat, le rugueux tout un monde. Je me perdrais peut-être entre ses crevasses et errerais dans ses méandres, mais point sans boussole.
Au nord est la peur, au sud la jouissance, et l'aiguille folle de mon désir oscille de l'un à l'autre comme un homme entre mes cuisses.

Aussi l'image de Luc me revient-elle en tête.
Après notre rencontre dans le sud de la France nous avions convenu de nous revoir à Paris.
Il vint chez moi à la tombée de la nuit.
Je l'attendais, vêtue simplement d'un jeans et d'une chemise.
- Mets ta robe rouge, m'ordonna-t-il en désignant le portant qui me servait de penderie.
Je lui obéis, me changeai dans la salle de bains et
marchai vers lui pieds nus, d'une légèreté dansante de ballerine.
Il me happa alors que je le croisai pour me porter sur le lit.

Le Luc que j'avais connu en vacances était attentionné et charmant. À mille lieues du fauve que je découvrais alors, m'écartelant sur le matelas et me mordant les épaules.
La robe finit roulée sur ma poitrine, dépenaillée sur mes hanches.
Sous le tissu étaient nos peaux dans leur vérité.
Les hommes ne sont jamais aussi sincères que lorsqu'ils font l'amour.

 

Photos Mapplethorpe et Santillo.

Par Chut ! - Publié dans : Classé X - Communauté : xFantasmesx
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Samedi 10 mai 6 10 /05 /Mai 02:27

IntermedeUn jour, Adrien m'appelle pour me demander conseil. Ayant besoin d'un lieu pour une rencontre amoureuse un peu particulière, il souhaite mon aide : connaîtrais-je quelqu'un susceptible de lui prêter un local, muni de crochets au plafond ?
La présence de ces crochets semble peut-être relever du détail.
Pas du tout. Ils sont au contraire d'une importance cruciale pour Adrien, car à eux il veut attacher sa soumise, l'écarteler afin de mieux profiter d'elle.

Je réfléchis. Non, je ne connais personne. Mais oui, je peux sûrement l'aider.
Pourquoi ne se servirait-il pas de mon appartement ? J'ai beau ne pas avoir de crochets au plafond, je possède de quoi les remplacer : une barre d'écartement à installer dans l'embrasure d'une porte.
Si ça lui va, il n'a qu'à disposer du tout.
Ça lui va.
Marché conclu.

Quelques jours avant son escapade, Adrien vient chez moi reconnaître les lieux et voir mon matériel. Alors que nous bavardons, l'idée surgit : pourquoi ne fixerais-je pas deux crochets à la poutre de mon salon ?
Le dispositif, en plus d'être commode, serait très discret.
J'accepte sans difficulté.
Sitôt dit, sitôt fait. Les crochets sont vissés de main de maître par Adrien (serait-ce d'ailleurs au vissage qu'on reconnaît un bon Maître ?). Passée entre eux, une corde terminée par des menottes.
Ne reste plus qu'à en régler la longueur.
La soumise d'Adrien est plus petite que lui et plus grande que moi. Nous convenons donc de nous y attacher tour à tour pour déterminer la bonne hauteur.
Sur le papier, cela paraît simple. C'est compter sans les imprévus d'une telle situation...

Je me place sous les crochets, lève les bras.
Adrien, posté dans mon dos, referme les menottes sur mes poignets.
- Comment te sens-tu, là ?
- Prisonnière.
- Prisonnière... Vraiment ? souffle-t-il dans mon cou.
Soudain, je sens son corps collé au mien, son sexe en érection plaqué contre mes fesses. Je n'ai pas un geste pour fuir ou me défendre.
D'ailleurs, ainsi attachée, comment le pourrais-je ?
Adrien, posant ses mains sur mes hanches, m'attire davantage à lui et me murmure à l'oreille :
- Dès que je t'ai rencontrée, dès la première fois, j'ai eu envie de toi...

Je souris, d'un sourire qu'il ne voit pas.
Là, je m'attends à ce qu'il me tire les cheveux, arrache mes vêtements, m'oblige à écarter les cuisses et me gratifie d'une bonne fessée pour paiement de mon insolence.
Mais non, je projette.
D'abord, je ne suis pas la soumise d'Adrien. Trop timide, trop respectueux, il ne se permettrait jamais ces libertés.
Ensuite, Adrien n'est pas cet homme que j'attends et qui m'a promis mille châtiments. Lui, je sais qu'il tirerait avantage de ma position, jouirait de me voir ainsi rendue à lui, esclave de sa volonté.

Intermede-copie-1Je tourne la tête. Les lèvres d'Adrien se posent sur les miennes.
Nous échangeons un baiser.
Nous échangeons nos positions.
C'est maintenant Adrien qui a les poignets enserrés par les menottes.
C'est maintenant moi qui suis dans son dos et pose mes mains sur ses hanches.
Nous nous regardons dans la grande glace du couloir. Sourions à nos reflets enlacés, rions d'avoir les mêmes pensées au même moment.


Bref aperçu :
- Drôle de rendez-vous, tout de même... Sa soumise adorera ce jeu de miroir, tant se voir prise décuple le plaisir d'être prise... Tiens, nous ne sommes pas mal assortis...
- L'image est belle, souffle Adrien.
Il a raison.
Mais bientôt, l'image se modifie, car je bouge.
Obligeant Adrien à se tourner dos au miroir, je ne joue plus le jeu de notre exhibition.
Se défaisant d'une menotte pour mieux me caresser, il ne joue plus celui du prisonnier.
Notre nouveau jeu se poursuivra dans l'autre pièce.

Une fois rentré, Adrien m'enverra un message pour me dire qu'il a encore mon parfum sur sa peau.
Et moi, je penserai que ces crochets resteront là où ils sont.
Parce que j'ai plein d'idées pour les utiliser... avec un autre.

Par Chut ! - Publié dans : Classé X
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