Dans ces bras-là...
Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.
Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire
comme jamais.
Camille
Laurens.
Décembre 2024 | ||||||||||
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Il y avait
un homme un peu gras, au torse velu orné de chaînes lui pendant jusqu'au nombril.
Un aux jambes athlétiques moulées dans un pantalon de cuir, les cils raidis de rimmel, les paupières soulignées au crayon.
Un autre encore, petit et mince, arborant perruque et diadème. Ses ongles vernis voltigeaient sur sa jupe lorsqu'il me glissa :
- Je suis Sissi. Voulez-vous jouer avec moi ?
Je songeai dans un sourire que de l'homme à la femme, le pas n'est parfois qu'un saut de puce.
Il y avait aussi des femmes, de très jolies femmes.
Une, taille étranglée dans un corset, avait le port d'une reine et la chevelure vaporeuse des sirènes. Son visage était celui d'une intouchable madone qu'on ne pouvait qu'adorer à genoux.
Une autre avait de longues jambes et des seins somptueux sous la résille, ronds et fermes comme les pommes du péché. Ses mamelons dressés soulevaient les croisillons du tissu pour mieux poindre entre les
mailles.
Appuyée contre un mur, elle s'offrait à la fessée.
À mesure des claques sa croupe rosissait puis rougissait, tandis que de ses lèvres s'échappaient des
plaintes de plus en plus aiguës. Elles devinrent mélopée lorsqu'un homme lui cravacha la peau.
Entre les paumes et la badine ses fesses tanguaient, roulis de plaisir emmêlé à sa chevelure que ses doigts fous agrippaient, tiraient, arrachaient.
La regardant, je pensai que c'était ça, l'extase : des coups en battements de
cœur, une tachycardie du désir, un délire de chairs moites haletant au rythme d'un tambour. Tour à tour caressante et pressée, furtive et appuyée, la cadence alternée des mains et de l'instrument
épousait les entrelacs de sa jouissance.
Y avait-il de la musique ? Je ne m'en souviens plus tant j'écoutais le battement des corps qui m'entouraient. Les gémissements de ma voisine renversée en levrette, les plaintes d'un soumis
piétiné sous les talons des bottes, les râles d'un soumis à quatre pattes, fouetté par deux Maîtresses.
Ce concert de cris et de soupirs était la mélodie interlope de la vie, aussi enivrante que mon whisky-coca. J'étais bien là, un peu grise, à observer le manège du désir qui tournait vite, de plus
en plus vite.
Lorsque je reposai mon verre, il y eut un bref silence. Puis, tranchant le
silence, une voix qui me souffla :
- Vous êtes dramatiquement belle.
Sensible comme je le suis à la tragédie, c'est l'adverbe qui me fit me tourner.
Une miniature de princesse s'était coulée à mes côtés sur le canapé. Elle avait les rondeurs des très jeunes femmes, un minois de petit chat aux lèvres charnues et aux grands yeux sombres, de courtes boucles rebiquant sur ses joues pâles.
- Je m'appelle Anaïs.
- Bonsoir, Anaïs.
Aucun autre mot n'était nécessaire pour l'enlacer, prendre sa bouche, enrouler ma langue à la sienne.
Les femmes ont entre elles des baisers encore plus doux que ceux qu'elles donnent aux hommes. Et ce fut cette douceur partagée qui me fit chavirer vers sa gorge,
écarter son soutien-gorge pour lécher ses seins lourds et tendres.
- J'ai envie de toi, murmurai-je.
- Mais je suis en pantalon...
L'obstacle annoncé n'en était pas un. D'un seul geste, je dézippai sa combinaison jusqu'à ses cuisses. Lentement
apparurent, albâtres dans la pénombre, sa poitrine généreuse, son ventre bombé, son nombril adorable, ses hanches de contrebasse et sa petite chatte épilée.
Anaïs, fraîche comme la rosée, avait la saisissante candeur des Vestales.
Les genoux à même le béton, je m'agenouillai comme on prie entre ses cuisses écartées, les mordillai en
remontant paresseusement vers son sexe. Offerte sur le canapé, Anaïs me cachait son visage. Pourtant, je sentais son trouble aux crispations de ses doigts serrés sur mon front, glissés entre mes
cheveux.
Notre amour fut d'abord à l'aveugle. Dans l'obscurité j'avançais, guidée par la boussole de mes
sensations, reliée aux siennes par un fil invisible.
Je m'inclinai pour lécher sa vulve lisse. Anaïs ouvrit davantage les jambes pour m'offrir son sexe. Et j'y
plongeai de la langue au menton, aspirant ses lèvres, titillant son clitoris.
Ses hanches s'agitaient de soubresauts. Je les forçai à rester immobiles pour introduire un doigt, puis deux, en elle.
Anaïs se redressa. Son visage ne tenait plus de la Vestale mais du démon.
- Encore... Plus fort... Je t'en prie...
Mes deux doigts coulissaient dans sa gangue chaude. Un troisième, aussitôt trempé de cyprine, les y rejoint.
- Fais-moi mal... Je t'en... supplie... Fais-moi mal !
Ma main tout entière la pénétra.
Ce fut un nid lové autour de mon poing serré. Un nid brûlant et moite qui
brutalement, me fit retourner à la matrice, à la vie même. Et je contemplais, fascinée, mon poignet sortant de ces doubles replis.
- Oui... Ouiii !
Anaïs cria très fort. Lorsqu'elle retomba sur moi telle une poupée de chiffons, je retirai lentement ma main.
Sur le canapé, nous nous serrâmes l'une contre l'autre.
Faire l'amour avec une autre femme est pour moi un double jeu. De plaisirs et de miroirs, car son corps, c'est aussi le mien.
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