Présentation

Paroles de lecteurs

Images Aléatoires

  • Monastere-de-Kong-Meng--Face-a-face.jpg
  • Amarupara-Pont-en-tek.png
  • A-l-aplomb-des-hommes-debout.jpg
  • Blanc-lagune.png
  • Yangon-Novice-sur-la-pagode.png

En lisant en écrivant

De la relativité de l'amour

 

/David a laissé/ un Post It où il y avait mes numéros de téléphone et une citation :

La littérature nous prouve tous les jours que la vie ne suffit pas.

Ou le contraire ?

J'ai bu un mauvais Nescafé dans son jardin de curé, les coudes sur une table en plastique blanc de camping ; c'est difficile de boire quand on ne peut cesser de soupirer.

Au sortir d'une nuit d'amour comme celle-là - et, malgré mon passé fastueux, des nuits comme celle qui venait de s'écouler je n'en avais pas tellement eu -, on a la sensation de ne plus être maître de soi, de ses lèvres, de ses mains, jusqu'à la respiration qui semble ne plus vous appartenir.

On s'est tellement mêlés, on a si prodigieusement été l'un l'outil du plaisir de l'autre, que reprendre son corps en main semble insensé.

 

Les premiers mots qui suivirent la nuit où on est non seulement tombés amoureux, mais littéralement tombés l'un dans l'autre, ont une singulière saveur de vérité. Plus qu'on ne le voudrait, on se découvre, à l'autre comme à soi.

Ils restent, ces mots-là, comme un écho qui rend tout le reste indécent.

/David/ me dit qu'il m'avait attendue ; il savait que je lui reviendrais, car j'étais faite pour lui de toute éternité ; moi seule pouvait le guérir de sa fracture profonde, de son mal de vivre ; il me dit que j'étais la femme qu'il avait le plus baisée dans sa vie, tout seul ou aux côtés d'autres.

Il me dit que son âme était à moi et qu'elle m'appartenait depuis toujours.


J'étais comme un enfant pauvre qui hérite de la fortune de Rockfeller.

En même temps, je ne pouvais pas, je ne voulais pas le croire. Ç'aurait voulu dire que je trahissais ce que j'étais, ce en quoi je croyais : que rien n'est éternel, qu'on est profondément et définitivement seuls ; et cela, au fond, me convenait parfaitement.

D'ailleurs, tout ce que j'avais vécu me le confirmait.

Mes meilleurs moments sont ceux que je passe en tête-à-tête avec moi-même, à me balader sur la berge d'un fleuve, à écouter le vent dans les feuilles des peupliers. Ou un livre à la main, étendue dans l'herbe. À écouter La Passion seon Saint Matthieu, à parler à un chat, à dormir dans un grand lit vide et un peu froid...

La présence d'un homme a toujours masqué, d'une certaine manière, mon bonheur. Je n'ai d'yeux que pour lui, alors que le reste du monde m'a toujours semblé plus intéressant que l'amour.

Il y a une vieille dame qui habite au fond de moi, une vieille dame agacée par tous ces frottements, toutes ces scènes, par les baisers et les larmes. Elle a les yeux clairs, la peau propre et sèche, et n'aspire qu'au calme pensif d'un matin d'hiver ; le reste, ça la laisse sceptique et un peu navrée.


Simonetta Greggio, Plus chaud que braise extrait du recueil de nouvelles L'Odeur du figuier.


 -----------------------------------------------    

Être d'eau

 

Je bénis l'inventeur des fiançailles. La vie est jalonnée d'épreuves solides comme la pierre ; une mécanique des fluides permet d'y circuler quand même.

Il y a des créatures incapables de comportements granitiques et qui, pour avancer, ne peuvent que se faufiler, s'infiltrer, contourner. Quand on leur demande si oui ou non elles veulent épouser untel, elles suggèrent des fiançailles, noces liquides. Les patriarches pierreux voient en elles des traîtresses ou des menteuses, alors qu'elles sont sincères à la manière de l'eau.

Si je suis eau, quel sens cela a-t-il de dire "oui, je vais t'épouser" ?

Là serait le mensonge. On ne retient pas l'eau. Oui, je t'irriguerai, je te prodiguerai ma tendresse, je te rafraîchirai, j'apaiserai ta soif, mais sais-je ce que sera le cours de mon fleuve ? Tu ne te baigneras jamais deux fois dans la même fiancée.

 

Ces êtres fluides s'attirent le mépris des foules, quand leurs attitudes ondoyantes ont permis d'éviter tant de conflits. Les grands blocs de pierre vertueux, sur lesquels personne ne tarit d'éloges, sont à l'origine de toutes les guerres.

Certes, avec Rinri, il n'était pas question de politique internationale, mais il m'a fallu affronter un choix entre deux risques énormes.

L'un s'appelait "oui", qui a pour synonyme éternité, solidité, stabilité et d'autres mots qui gèlent l'eau d'effroi.

L'autre s'appelait "non", qui se traduit par la déchirure, le désespoir, et moi qui croyais que tu m'aimais, disparais de ma vue, tu semblais pourtant si heureuse quand, et autres paroles qui font bouillir l'eau d'indignation, car elles sont injustes et barbares.

 

Quel soulagement d'avoir trouvé la solution des fiançailles ! C'était une réponse liquide en ceci qu'elle ne résolvait rien et remettait le problème à plus tard.

Mais gagner du temps est la grande affaire de la vie.

 

Amélie Nothomb, Ni d'Ève ni d'Adam.


 -----------------------------------------------    

Bonheur

Un seul bonheur, tout d'une pièce, terrestre et céleste à la fois, temporel et éternel d'un tenant : le bonheur d'être au monde, en ce monde-ci, de l'habiter pleinement et de l'aimer tout en le reconnaissant inachevé, traversé d'obscures turbulences, troué de manque, d'attente, meurtri, raviné par d'incessantes coulées de larmes, de sueur et de sang, mais aussi irrigué par une inépuisable énergie, travaillé de l'intérieur par un souffle à la fraîcheur et à la clarté d'autore - caressé par un chant, un sourire.

Le bonheur imparti à Bernadette, comme à tous les hommes et femmes de sa trempe, consistait à avoir reçu un don de claire-voyance, de claire-audience qui lui permettait de percevoir l'invisible diffus dans le visible, la lumière respirant même au plus épais des ténèbres, un sourire radieux se profilant à l'horizon du vide, affleurant jusque dans les eaux glacées du néant.

Le don d'une autre sensibilité, d'une intelligence insolite, et d'une patience sans garde ni mesure.

Le don d'une humilité lumineuse - clef de verre, de vent ouvrant sur l'inconnu, sur l'insoupçonné, sur un émerveillement infini.

 
 

Sylvie Germain, La chanson des Mal-Aimants.

 

-----------------------------------------

Femmes, femmes, femmes...


Je me demande ce qu'aurait été ma vie plus tard si, enfant, je n'avais pas bénéficié de ces petites réceptions chez ma mère. C'est peut-être ce qui a fait que je n'ai jamais considéré les femmes comme mes ennemies, comme des territoires à conquérir, mais toujours comme des alliées et des amies - raison pour laquelle, je crois, elles m'ont toujours, elles aussi, montré de l'affection.

Je n'ai jamais rencontré ces furies dont on entend parler : elles ont sans doute trop à faire avec des hommes qui considèrent les femmes comme des forteresses qu'il leur faut prendre d'assaut, mettre à sac et laisser en ruines.

 

Toujours à propos de mes tendres penchants - pour les femmes en particulier -, force est de conclure que mon bonheur parfait lors des thés hebdomadaires de ma mère dénotait chez moi un goût précoce et très marqué pour le sexe opposé. Un goût qui, manifestement, n'est pas étranger à ma bonne fortune auprès des femmes par la suite.

Mes souvenirs, je l'espère, seront une lecture instructive, mais ce n'est pas pour autant que les femmes auront plus d'attirance que vous n'en avez pour elles. Si au fond de vous-mêmes, vous les haïssez, si vous ne rêvez que de les humilier, si vous vous plaisez à leur imposer votre loi, vous aurez toute chance de recevoir la monnaie de votre pièce.

Elles ne vous désireront et ne vous aimeront que dans l'exacte mesure où vous les désirez et aimez vous-mêmes - et louée soit leur générosité.

 

Stephan Vizinczey, Eloge des femmes mûres.

Tic tac

Mai 2024
L M M J V S D
    1 2 3 4 5
6 7 8 9 10 11 12
13 14 15 16 17 18 19
20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31    
<< < > >>

Recherche

Profil

  • Chut !
  • Le blog de Chut !
  • Femme
  • 02/03/1903
  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.

Flux et reflux

Syndication

  • Flux RSS des articles

Créer un Blog

Samedi 22 décembre 6 22 /12 /Déc 15:33

Double agressionJ'ai rendez-vous avec Mathilde, une amie de passage à Paris.
C'est l'été, il fait beau, j'ai envie d'être jolie. Devant ma penderie, j'hésite. Oserais-je étrenner ma nouvelle robe ? Coupée au-dessus du genou, sans bretelles, elle est rose bonbon, traversée d'une bande noire à la poitrine. Pas de quoi fouetter un matou, sa matière exceptée : du latex mat hyper moulant, une vraie seconde peau.
De loin, on la croirait en tissu. De près, le doute n'est plus permis.
Dans la rue, je ne passe pas inaperçue. Les femmes me scrutent, les hommes me sifflent. Ma tenue serait-elle trop ?

Face au miroir, avant de partir, je ne la trouvais ni vulgaire ni provocante. Juste un brin plus sexy que la moyenne de belle saison, qui pousse les filles à découvrir leurs jambes et les attaches de leur soutien-gorge.

Mathilde et moi nous séparons. Je rentre chez moi comme je suis venue : à pied, de la musique à fond dans les oreilles. Dans ma rue, un homme gare sa voiture. Il me lance un sourire, je le lui retourne. Après avoir posté un courrier, j'arrive à ma porte cochère, en compose le code, la pousse. Au moment où je vais entrer, l'homme de la voiture - appelons-le X - m'adresse la parole. Je sursaute. Isolée dans ma bulle de musique, je ne l'ai pas entendu arriver.
Je coupe le son du baladeur pour lui répondre gentiment :
- Merci de me proposer votre numéro de téléphone, mais je n'en ferai pas usage.
Nous échangeons encore une ou deux phrases, pas plus. Et là... deux gars qui remontaient la rue s'arrêtent à notre hauteur. Un très grand, posté en retrait, auquel je ne prête pas attention. Un plus petit, look baggy, dans les 20 ans, presque collé à nous.
Il nous lance :
- Salut, ça va ?
X et moi répondons en choeur :
- Oui, merci.
Je suppose qu'il s'agit de potes qui viennent de le croiser par hasard. Mais le jeune insiste :
- Alors, ça va ?
Je réponds, seule, cette fois :
- Ca va, merci.
Les yeux de X croisent les miens. Tout à coup, je sens un truc qui cloche. Quoi exactement, aucune idée, mais un signal d'alarme retentit dans ma tête. Puis, soudain, la certitude : X ne les connaît pas, il a supposé comme moi que ces gars me connaissaient.
Moment de flottement, très court.
Dans un rictus, le jeune reprend, plus nerveux, plus abrupt :
- Alors, vous faites quoi ce soir ?
Je réplique en me forçant au naturel :
- Rien, et là, on rentre.
- Ah ouais ?
Son intonation est devenue menaçante. Ça va très mal tourner, j'en suis certaine.
Je dis à X, comme si je le connaissais de longue date :
- Allez, viens.
J'ouvre grand pour le laisser passer. Me faufile derrière lui à toute allure, pèse contre la porte de tout mon poids. Le bras du type surgit dans l’ouverture pour la bloquer. Trop tard, elle s'est déjà refermée. Il enfonce tous les boutons du digicode. En vain, il n'a pas la combinaison de chiffres pour entrer.
Ivres de rage, les deux gars tentent de défoncer la porte à coups de poings et de pieds.
- Ouvre-nous, connard, enculé !

X et moi nous dévisageons, abasourdis, effrayés. Je lui chuchote :
- Ne restons pas là, suis-moi.
J'ouvre la deuxième porte avec ma clé. Dans la cage d'escalier, nous serons en sécurité. Plus de risque qu'un locataire distrait ne leur ouvre pour qu'ils déboulent sur nous comme des chiens.
Coincés dans la rue, ils braillent à tue-tête :
- Fils de pute ! On va la baiser, ta meuf !
X réalise d'un coup ce à quoi nous venons d'échapper : si nous étions restés dehors, ils m'auraient empoignée et l'auraient mis à mal ; si je l'avais laissé seul, il lui aurait défoncé la tête.
Il me remercie chaleureusement, ose l'humour :
- C'est la première et dernière fois que je drague une fille dans la rue... Trop risqué, comme sport !

Enfin, il m'annonce qu'il va repartir. Je lui conseille d'attendre encore. Il y a des bruits suspects derrière la porte, un sifflement strident dans la cage d'escalier. Les types ont abîmé le digicode à force de taper dessus.
Sans réfléchir, je lui propose de monter chez moi, le temps de nous calmer et de boire un remontant.
Il accepte. Je m'excuse par avance pour le désordre, pas pris la peine de ranger hier...
Il s'en fiche : par rapport ce qui vient d'arriver, c'est plus qu'un détail.

Je traverse le couloir de mon appartement, X sur mes talons. Soudain, le rouge me monte aux joues. Éparpillés sur mon coffre, inratables, mes achats de la veille : des robes en vinyle, une jupe en latex, une paire de cuissardes... sans compter les menottes, les pinces et le fouet qui ont servi pour une joyeuse soirée.
Gloups.
Je me précipite, lui bloque la vue, ramasse le tout l'air innocent. Me persuade, avec la mauvaise foi des coupables, qu'il n'a rien remarqué. Mais... Adroite comme je suis, au moment où je soulève le paquet, on entend un BING ! sonore.
Je me fige. Je regarde à mes pieds.
Ouille ! Tombés sur le plancher, pile à côté de ses chaussures, un bâillon-boule et un godemiché rose !

On a quand même bu un verre. Il est parti au bout d'une demi-heure.
Qu'a donc raconté X aux amis qu'il rejoignait ?

Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour - Communauté : xFantasmesx
Ecrire un commentaire - Voir les 2 commentaires
Samedi 22 décembre 6 22 /12 /Déc 14:14

Joyeux Noel bisLes fêtes approchent à grands pas. En mon absence (je reviens d'Asie), les rues du quartier se sont refaits une beauté.

Des guirlandes illuminent les façades des immeubles. Des loupiotes colorées se détachent sur le ciel.

La nuit, c'est calme, c'est joli.

Mais le jour, à ras de terre, c'est la cohue.

Une foule compacte traîne sur les boulevards, se presse dans les magasins. Chacun essaie de trouver la solution au casse-tête annuel : qu'offrir à des gens qui ont déjà tout ?
À des enfants dont les placards croulent déjà sous les jouets ?
À l'obscure tante de province, la parasite du réveillon ?


Des arrangements se concluent, des disputes éclatent, des rancœurs resurgissent :
- L'objet vaut tant, je mets la moitié, tu complètes. Comment ça, c'est trop cher ?
- Quoi, tu offres ce truc minable ?
- Vu son cadeau de l'an dernier, à cette vieille rosse, pas question de me ruiner !
Moi, à la question "Tu les as achetés, tes cadeaux ?", je réponds :

- Ben non, désolée.
J'ignore encore où je passerai Noël, ce qui pourrait être une excellente raison : on n'offre pas la même chose aux parents de son chéri qu'à sa meilleure amie. Mais ce ne serait pas la bonne.
Je suis en vérité un éteignoir, une immonde pisse-froid, un vrai bonnet de nuit.

Noël m'ennuie, le 31 décembre m'horripile. Les huîtres et les embrassades forcées me collent des boutons ; le saumon et le foie gras me donnent la nausée.

Pour un peu, je renverrais ses marrons à la dinde, collerais la bûche au grand-marnier dans la cheminée.
Voilà, c'est dit.

Pas plus cette année que les précédentes je n'ai envie de faire la fête.

Joyeux noel 2Pourtant j'adore faire des 
cadeaux. Mais pas à date fixe. Et encore moins par obligation.

J'aime tomber par hasard sur une babiole qui plairait à un(e) ami(e). Simple gadget à valeur sentimentale et non marchande, qui lui souffle que je connais ses goûts, que j'ai pensé à lui ou elle.

Rappel du lien tissé entre nous, de mon souhait de le tresser plus serré.
Si je le pouvais, je n'emballerais que des cadeaux nommés désirs.

Ou des contre-cadeaux, pour me venger : une brassée de gratte-cul à un oncle, Le Guide du savoir-vivre pour les Nuls à sa femme.

Il y a des cadeaux pires que des insultes.

Un exemple ?

Il y a trois ans, j'ai fêté Noël en compagnie de cette tante.

Elle est arrivée au repas avec son mari, en retard et en habits de tous les jours. Passe encore, je ne suis pas tant à cheval sur les convenances.

Mais j'ai vu rouge lorsqu'elle a lancé sur la table, pile dans l'assiette de ma grand-mère, une mauvaise boîte de chocolats. Fraîchement achetée à l'hyper du coin et même pas emballée.
Et la félonne de claironner :
- C'est pour vous, Mamie, j'espère que ça vous plaira !
Mon oncle a opiné sans desserrer les dents.
Ma grand-mère a pris la boîte. A remercié son fils et sa femme. Leur a tendu en échange son traditionnel chèque à plusieurs zéros, glissé dans une jolie enveloppe.
Des perles donnés aux cochons, je vous dis.


Pin-up de Gil Elvgren.

Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
Ecrire un commentaire - Voir les 3 commentaires
Vendredi 21 décembre 5 21 /12 /Déc 19:28
Âmes sensibles s'abstenir... Voici une scène très hard, vue de mes yeux, à la fin d'une soirée BDSM.

Toujours le même lieu : la cave de l'enfer et des délices, tendue d'un grand rideau noir.
Je discute avec deux hommes. Des cris venus de derrière le rideau coupent notre conversation à intervalles réguliers. Au début, nous n'y prêtons pas vraiment garde : une punition est en cours. Certes salée, mais c'est parfois la loi du genre.
Dix minutes s'écoulent. Les hurlements redoublent et le malaise nous envahit.
Que se passe-t-il donc ?
Nous nous glissons de l'autre côté.

En haut de l'escalier, points de mire de tous, un homme et une femme. Lui est habillé en dominant, elle à moitié nue.
L'échine courbée, la tête enfouie dans ses bras repliés, elle offre son cul à qui veut le prendre.

Pour la sodomiser, il y a foule : une chaîne d'hommes patiente jusqu'en bas des marches. Le premier de la file attend que celui qui le précède décharge pour occuper enfin sa place.
Soumise à leurs coups de boutoir répétés, la fille hurle non de jouissance, mais de douleur. Posté à côté d'elle, indifférent à ses plaintes, son Maître lui caresse de temps à autre les cheveux.
Pour la remercier d'être une brave bête à foutre ?

Cette pratique a beau me déplaire, je n'ai pas à la critiquer si elle comble le couple. Mais là, de toute évidence, la fille n'était pas dans son état normal. Nous nous en sommes rendus compte à la fin de cette séance publique, lorsqu'elle a voulu se relever. Bourrée ou droguée, elle tenait à peine debout. Après quelques pas esquissés, elle a même basculé à la renverse dans les détritus jetés au sol. Moins une qu'elle ne se coupe sur les bouts de verre ou ne se fracasse la tête sur le béton.
Son ami l'a remise d'aplomb puis rassise sur les marches.

J'échange un regard consterné avec les deux hommes qui m'accompagnent. Mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises ou plutôt, de notre indignation. Voilà qu'un jeune mec, qui a assisté à l'intégralité de la scène, la reluque en baissant son froc. Et, sexe dressée, il se colle à son visage pour qu'elle lui taille une pipe !
Heureusement, le dominant le repousse. Le gars, déçu, repart en traînant des pieds.

Ces scènes m'ont vraiment choquée. Même si l'on y joue sérieusement, le BDSM n'est et ne reste pour moi qu'un jeu. En aucun cas, un moyen de profiter d'autrui ou de nuire à son intégrité physique.
Que des spectateurs sautent sur l'occasion pour glaner du sexe, cela fait partie de la règle. Mais qu'ils abusent d'une personne en position de faiblesse me dégoûte, comme m'écœure l'attitude irresponsable d'un mauvais Maître.

Être dominant(e) ne donne pas tous les droits ; mieux, ce statut suppose des devoirs. À commencer par celui, essentiel, de respecter et de préserver son (sa) partenaire.
Et non, les soumises ne sont pas que des femmes à consommer, dont n'importe qui peut abuser sous prétexte qu'elles n'ont pas voix au chapitre.
Par Chut ! - Publié dans : Classé X - Communauté : xFantasmesx
Ecrire un commentaire - Voir les 3 commentaires
Vendredi 21 décembre 5 21 /12 /Déc 16:20
En haut du cou, sous la naissance des cheveux, j'ai une tache de naissance : une plaque rouge aux contours indéfinis. Placée sur une autre partie du corps, elle aurait été disgracieuse. Là, elle est invisible. Tellement invisible que j'ai grandi avec sans m'en apercevoir. Ce n'est d'ailleurs pas moi qui l'ai découverte.
Mais qui donc ? Je ne m'en souviens plus.

Ma mère, ma grand-mère avaient la même, exactement au même endroit. Mystère couplé de la généalogie et de la génétique, c'est notre "tampon de fabrique" hérité d'une lointaine aïeule.

J'aime penser que je porte, gravé sur le corps, le sceau de mon appartenance aux femmes de ma lignée. Sans que je ne l'ai désiré ni demandé, une de leurs bizarreries m'a marquée au fer rouge.
Toutes ensemble réunies, nous formons les rangs d'une société secrète. Si elles vivaient encore, nous pourrions même nous reconnaître grâce à cette marque cachée.

Si j'ai une fille un jour, j'espère qu'elle la portera aussi.
Estampillée et sous le signe du lien placée.
Par Chut ! - Publié dans : Bribes perso
Ecrire un commentaire - Voir les 2 commentaires
Vendredi 21 décembre 5 21 /12 /Déc 02:51

Là-bas, c'est une maison à la façade sans charme, perchée en haut d'une impasse dans une ville grise.
Le quartier est triste : des maisons basses, avec courette ou jardin, quelques immeubles. À mesure des années, les commerces ont disparu. La quincaillerie d'abord, le boucher ensuite. Après son départ à la retraite, personne ne l'a remplacé.

Il n'y a pas si longtemps, la coiffeuse s'est pendue chez elle. L'affaire a fait la une de la gazette officieuse du quartier, ces commères qui passent leur temps à le tuer.

Il faut dire que le salon d'Anne-Marie, c'était le dernier rendez-vous où l'on cause. Les mamies à cheveux bleus s'y retrouvaient pour une mise en plis en commentant les nouvelles. Anne-Marie les connaissait toutes, avait un mot aimable pour chacune. Pour fidéliser sa clientèle ou lui donner un coup de peigne, elle était à sa main.

Heureusement que le petit Casino, lui, restait ouvert. Ilôt de résistance, il tenait tête aux super et hypermarchés de la grande ville voisine. Y faire ses courses, c'était l'assurance de payer chaque article deux fois plus cher, mais aussi de croiser une voisine. D'échanger avec elle quelques mots sur la météo, puis de les répéter près de la caisse à la gérante qui donnerait la réplique.
Un jour, faute de clients ou de repreneur, le Casino a lui aussi fermé. Placardé à l'entrée, un panneau annonce toujours les heures d'ouverture et les jours de congé. Les prospectus glissés sous la porte ont fini par former un tapis épais. Limon bariolé de réclames et de promotions, toutes périmées.
Les grands-mères ont dû partir aux commissions ailleurs. Les plus chanceuses étaient conduites par leurs enfants, qui portaient aussi leurs sacs. Les autres se débrouillaient par elles-mêmes, parfois avec l'aide des voisines.
La mienne s'en arrangeait seule. Un panier glissé sous son bras, elle descendait l'impasse à pas menus, attaquait la grande côte menant au supermarché le plus proche. Vingt minutes aller, trente retour, les voyages ont fini par peser lourd sur ses jambes fluettes.
À présent, ne restent plus dans le quartier qu'un bar-tabac fermé la moitié de la journée, un coiffeur qui vivote, une boulangerie qui vend des gâteaux rassis.

L'année en plusCe là-bas ne me manque pas. Pourtant, j'y reviens encore, par obligation et non par envie.

Mais en étant sincère, j'ai la nostalgie de la maison à la façade sans charme, perchée en haut de l'impasse.

Cette bâtisse fut l'un de mes deux lieux d'enfance. Elle m'a protégée gamine, abritée ado, accueillie adulte. Je m'y revois en pyjama, à quatre pattes, tambourinant sur les casseroles ; vautrée sur les canapés, à fumer en sifflant le whisky de l'armoire à alcools ; allongée sur le lit de la grande chambre, à réviser en urgence des partiels ; assise à la cuisine, dans la serre, dans la baignoire, sur les tapis...
Mes souvenirs de trente ans de vie y sont attachés. Futiles, drôles ou tristes, il m'y enracinent, me soudent aux murs et au plancher.
De la cave au grenier, cette maison fait partie de mon être. Ce n'est plus moi qui l'habite, c'est elle qui m'investit. Ses meubles pourront être déménagés, ses tapisseries décollées, ses cloisons abattues, elle continuera à faire de moi son domicile fixe.

Je n'ai pas le choix de l'accepter ou de le refuser. C'est ainsi.
Ma grand-mère, après y avoir passé plus de la moitié de son existence, l'a quittée le 1er janvier dernier. Depuis, sa maison vit dans ma mémoire. Aujourd'hui, j'ignore si je suis capable d'y mettre les pieds. J'aimerais, cependant, au moins une dernière fois avant qu'on ne me l'arrache, qu'on ne la sépare de moi à mon corps défendant.

Un jour sa maison sera vendue. Ce jour-là je sais que je la perdrai tout à fait, comme j'ai perdu auparavant ceux que j'aimais.

Les territoires de l'intime sont fragiles. Balayé par le souffle du temps, leur ciment devient sable puis cendre. Et les passants marchent dessus sans s'en apercevoir, réduisant notre cœur en bouillie.

Par Chut ! - Publié dans : Bribes perso
Ecrire un commentaire - Voir les 4 commentaires
 
Créer un blog sexy sur Erog la plateforme des blogs sexe - Contact - C.G.U. - Signaler un abus - Articles les plus commentés