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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • 02/03/1903
  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Dimanche 28 mars 7 28 /03 /Mars 11:33

Autostop.pngKota Kinabalu, alias KK, Kéké pour les intimes, distille l'ennui discret d'une vieille tante de province. Un peu morose, un peu rancie, pas vraiment désagréable mais sans rien qui accroche.
Ici je suis gagnée par la torpeur, lente cuisson qui me vide de mes forces.
Mais pourquoi donc suis-je si fatiguée ? Je ne fais pourtant pas grand chose. Et c'est sûrement ce presque rien qui m'épuise.
A Kota Kinabalu je surnage sur les rives d'une langueur mêlée de migraines.

Mon corps est dur comme la pierre. Dos, fesses, cuisses, mollets... Leurs contractures résistent aux massages les plus doux comme les plus vigoureux. Sortie hier délassée du salon de beauté, je n'avais pas marché cinq cent mètres que la douleur revenait, ténue puis bien présente.
Raideurs, gêne, plaques d'acier collées à ma chair, et cette envie pressante de m'allonger, là, pour dormir.

A Kota Kinabalu je sillonne les rues tenaillée par la faim. Comme l'an dernier après quelques mois de voyage, ce blocage sur la nourriture : rien ne m'attire, tout me dégoûte. L'odeur des nouilles frites me lève le coeur, la vision des plats de riz me donne la nausée.
Je rêve de mets simples, de tomates mûres à la croque au sel, de fromage frais sur une tranche de pain. Alors je vais au supermarché et je triche. Concombres, processed cheese et crackers en ersatz.
De retour à la guesthouse, je mange en tête-à-tête avec mon assiette. M'arrête quand je pense que c'est assez. Mon estomac ne m'envoie aucuns signaux : il est comme moi, muet.
Je bois, beaucoup. De l'eau filtrée, une belle saloperie de zéros pointés en -ium (calcium, magnésium, potassium), du Coca et des jus de fruits pour compenser.

Je manque de sucre, peut-être. De sucre et de sable, de mer et de plus immatériel. D'énergie et d'amitié, de fous rires et de plongées, de chaleur et de sexe. Voilà longtemps que je n'ai pas fait l'amour, que mon corps n'a pas été touché. Désiré, si, par ces hommes qui me croisent, moi l'étrangère, et s'attachent à mes pas. Me sifflent comme leur chien ou s'exclament à mon passage.
Je ne lève pas la tête. Je continue ma route sans répondre.
Puisque je suis muette, je peux aussi être sourde.

Melancolie malaisienneA Kota Kinabalu je manque de partage mais n'ai rien à partager. Alors je fais comme toujours, le dos rond en attendant que ça passe. Parce que ça passe toujours, bien sûr.
En attendant, je me replie dans ma coquille de Bernard-l'Ermite, livrée à une douce mélancolie.

A Kota Kinabalu je parle dans ma tête. Les voix des amis lointains et des morts me répondent. Je dialogue avec les absents, à moins que les absents ne parlent à travers moi.
C'est parfois tendre comme un vin cuit, brutal comme une rasade de whisky. J'en ai le sourire aux lèvres ou les larmes aux yeux. Et lentement je glisse dans des spirales de musique.

A Kota Kinabalu j'écoute du jazz, beaucoup. Mehldau, Coltrane, Jarrett et Miles. Ascenseur pour l'échafaud, c'était jusqu'à présent Singapour, les longues marches à l'horizon de trottoirs coupés de gratte-ciels. Maintenant, Miles sera aussi un bout de Kota Kinabalu.
Et toujours, à fleur de peau, trois chansons qui me suivent partout.

Demain ailleur
s de CharlElie, le symbole même du voyage, écoutée jusqu'à plus soif en Inde sur les quais de gare, dans les trains en Chine, dans un minivan en Malaisie alors que, dans un ciel d'encre, deux étoiles filantes se croisaient avant de s'éteindre.
Lean to the glass de cette artiste que je découvris sur scène à Paris. Coup de foudre pour sa voix éraillée et ses paroles qui m'évoquent tant :
You're dying to tell me how sweet is that sun
Well... Why don't you tell me how far you've come ? [...]
Don't make me wait on you, it's just to hard to do.
Highway blues, sur laquelle je tombais "par hasard" à l'aube de ma nouvelle vie, allongée sur la banquette du bus qui se dirigeait vers mon île.

Kota Kinabalu est au carrefour de mes routes, un point névralgique de mes souvenirs, une addition de peaux successives moins celles abandonnées en défroques. 
Kota Kinabalu est aussi un contrecoup en brusque descente. Etriquée après les immensités d'eau à perte de ciel, mesquine après tant de beauté, polluée de trop de voitures, de bruits, d'odeurs. Même la mer est ici civilisée, ceinte dans une baie bardée de terrasses et de promeneurs.
Le ponton désert de Mabul Island me revient en nostalgie, comme les plantes de mes pieds nus brûlées par le sable blanc.

Melancolie malaisienne2A Mabul quelqu'un a volé mes chaussures. Elles étaient restées trop longtemps à la même place sans que je ne les touche.
A Mabul je dormais d'un trait jusqu'au matin, rechargée de la nuit.


Seul un bel homme avait le pouvoir de briser mes rêves. Arrivé après moi, il occupait le lit superposé au mien.

Lorsqu'il grimpait à l'échelle pour se coucher, son corps puissant faisait osciller la structure de métal, me roulant d'un bord à l'autre du matelas.

Lorsqu'il s'agitait dans son sommeil, le mince sommier protestait, couinait, menaçait de s'affaisser.


Plus d'une fois je craignis qu'il ne cédât pour le précipiter sur moi, m'écrasant de sa masse, me rompant la colonne et le cou.

Sur moi ou juste à côté dans une étreinte fortuite.
Cet homme se trouve à présent à Kota Kinabalu.
Et moi j'en pars, enfin.

 

 

Dernière photo de Sieff.

Par Chut ! - Publié dans : Voyages, voyages
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Commentaires

Dans le petit village où je vais diriger une colonie pendant deux semaines, se trouve une petite école qui fait classe unique pour tous les niveaux.

Sur la facade de cette école, un cadran solaire est posé, et sur lequel il est écrit cette phrase qui se prête à certaines errances :

« Certains resteront, d'autres choisiront l'illusoir chemin du partir. »

commentaire n° :1 posté par : Benjamin L le: 30/03/2010 à 22h27

Euh, Benjamin... Veux-tu dire que je fais fausse route ? Que ce mode de vie-voyage est une forme de fuite ? Ce n'est pas du tout ainsi que le ressens. Y a toujours des moments un peu durs dans un parcours, des passages à vide. KK en était un, d'autant moins évident à négocier que le contraste entre un lieu extraordinaire et le retour à la ville était violent. Puis les projets que j'avais faits pour l'après KK sont tous tombés à l'eau un à un... Ca aussi, c'est un peu perturbant !

Depuis que j'ai quitté KK pour retrouver une Française rencontrée sur la route, le moral est remonté en flèche. Cela ne me dit pas encore de quoi sera fait la suite, mais je vais trouver. :)

réponse de : Chut ! le: 01/04/2010 à 09h05
Je ne sais pas… Je ne pense pas que le mode de vie « voyage » soit forcément une fuite en soit. Sinon, je ne me préparerais pas deux fuckin' grandes virées pour les deux prochaines années (enfin la seconde grande virée, c'est encore du projet de projet qui ne date que d'hier : aller wwoofer en Palestine) Je crois juste qu'il y a des moments où ils peuvent être utiles. Et d'autres fois où ce n'est pas forcément le cas. Comment discerner les uns des autres quand on a le nez dans le guidon ? Ce n'est pas forcément super-évident sur le moment. Pour le moment, je me contente juste de me réjouir que ça aille mieux pour toi. :)
commentaire n° :2 posté par : Benjamin L le: 01/04/2010 à 09h19
D'acc, je vois mieux ce que tu veux dire. :) Faudrait que j'écrive un article (ou plusieurs, le sujet est vaste !) sur ma façon de vivre - et donc de voyager. C'est palpitant, usant parfois, et toujours riche en surprises. Là, il y a clairement une différence d'optique avec avant, où j'avais une date butoir de retour en Europe. Depuis que j'ai quitté l'île, je suis comme l'oiseau sur la branche, me déplaçant au gré de mes envies, des rencontres et des lieux de plongée. Je ne suis allée en Malaisie que pour ça : réaliser le rêve de tremper mes palmes à Sipadan... et je n'ai pas été déçue ! Là, je suis à nouveau aux Philippines, mais le temps n'est plus trop de la partie. Snif. Des bouleversements sur "mon" île ne me donnent pas très envie d'y rentrer, du moins pour le moment. J'ai une visibilité à une semaine, ensuite, c'est le grand flou. J'vous dirai. :) Sinon, qu'est-ce donc que wwoofer ? Jamais entendu ce mot-là !
réponse de : Chut ! le: 01/04/2010 à 09h43
WWOOF, l'acronyme pour « World-Wide Opportunities on Organic Farms ». Le principe, c'est d'aller bosser dans des fermes bio' de part le monde, en échange d'un logement, de la bouffe, et d'une opportunité pour apprendre.
commentaire n° :3 posté par : Benjamin L le: 01/04/2010 à 09h51

Merci beaucoup pour l'info ! Je n'en avais jamais entendu parler. Lacune réparée (et joli projet, en effet) !

réponse de : Chut ! le: 01/04/2010 à 10h18
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