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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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  • Le blog de Chut !
  • Femme
  • 02/03/1903
  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Dimanche 13 janvier 7 13 /01 /Jan 20:20

 

Koh Tao, Thaïlande, début décembre 2013.

 

 

7-eleven 1J'ai rencontré Min à la plage. Ou plutôt, sa haute taille s'est imposée à moi en me cachant le soleil.

J'ai observé ce géant à la peau diaphane, au large chapeau de paille et aux lunettes de soleil stylées mouche. L'ai sur le champ pensé Japonais ou Coréen, avec une préférence pour Coréen.

Le tee-shirt 7-Eleven*, sans doute.

Je ne me trompais pas.

 

Min est un Coréen qui, comme nombre de ses compatriotes, ne parle - hélas - qu'un anglais rudimentaire. Mais Min est, se veut et se réclame différent.

Lui recherche le contact des étrangers.

Lui se déplace seul, surtout pas en groupe.

Se mêler aux hordes de Coréens en vacances, pas question. Quand Min part à l'étranger, c'est pour agrandir ses horizons.

Sauf que Min reste malgré tout très Coréen.

"Tu peux enlever un homme de la jungle, mais pas la jungle de l'homme", avait un jour prophétisé un instructeur de plongée.

Il avait mille fois raison.

Min fuit le soleil qui fait virer au caramel. En Corée le bronzage est jugé laid, voire infâmant - comme (presque) partout en Asie.

Min ne sait pas nager. Se baigner, c'est pour lui marcher sur le sable, à faible profondeur, en agitant les bras. Vu de loin, sa brasse mêlée d'éclaboussures fait illusion. De près, elle attendrit.

Min vit encore chez papa-maman, toujours dans sa minuscule chambre d'enfant. Il la quittera lorsqu'il se mariera, s'il se marie un jour : à 30 années moins une, Min accuse un sérieux retard.

Son frère aîné, également célibataire, est également resté au nid.

Leurs parents s'en attristent : les fils, ça prend femme et ça fait des enfants. À 25 ans dernier carat.

 

Ce n'est pas le seul souhait familial auquel Min a dérogé.

Min n'a pas un bon travail, un qui rapporte. Min une passion, la musique, une guitare qu'il ne traîne pas en voyage et le rêve fou de s'exiler aux États-Unis, à Memphis la patrie du blues. Mais de Seoul à Memphis, oh Americain, long is the road.

Alors Min a tracé une croix sur ses espoirs.

Alors Min cumule les petits boulots pour s'en sortir : livreur, cuisinier, serveur dans un bar branché, où il est vite devenu la coqueluche des filles.

Faut dire que Min est très grand. Très musclé aussi.

- Et je n'ai pas le nez plat ! s'enorgueillit-il dans une moue coquette. Toi non plus, d'ailleurs.

- Mais moi, c'est normal. Je suis Européenne.

Long nose... Il s'étonne du surnom peu flatteur que nous donnent les Philippins. Pour Min, "long nose" est un compliment.


7-eleven 2Au lit Min ne s'autorise pas un mot, ne lâche pas une plainte, ne se permet pas un soupir.

- Ce n'est pas viril. Un homme qui s'exprime ? Une lavette. Honte à lui !

Dans les Love Hotel, on ne doit entendre que les femmes et on n'entend d'ailleurs qu'elles. Souvent à un volume tel qu'elles semblent se livrer à une compétition d'une chambre à l'autre.

- Pendant l'amour, seules les femmes crient, insiste Min. Et crier, elles le doivent, à plein poumons ! Toi, par exemple, tu ne cries pas assez...

Je fixe Min d'un air ahuri.

Voilà bien la première fois qu'on m'adresse ce reproche !


Min affirme que les Coréennes sont superficielles, ne prêtent attention qu'au physique - à commencer par le leur. Mais Min prend également grand soin de son apparence.

Min sait ce qui est tendance et ce qui ne l'est pas. Il a l'oeil du lynx et des avis d'expert sur ma robe, mes yeux, mes fesses, mon tatouage iban, ma chevelure "à couper comme ci, comme ça, jamais".

Ses doigts miment des ciseaux pendant ses lèvres chuintent tchhk tchhk tchhk !

Min m'imagine en lolita. Min me recoiffe en midinette.

- Arrête ! dis-je. Je ne suis pas une poupée !

- Dommage...

Pour me venger, j'étouffe Min sous l'oreiller. Il glousse.


 

Min n'hésite pas à partager ses opinions ni à demander ce qu'il désire. Ainsi, debout près du lit, m'enjoint-il :

- Rhabille-toi, s'il te plaît !

- Pardon ?

Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris, pas sûre que mon amant ait bien exprimé sa pensée. Mon désarroi le pousse à joindre le geste à la parole, à mimer, d'une main, l'enfilage d'une veste en me tendant, de l'autre, ma robe.

- Trop tard ! dis-je. Nue je suis, nue je reste !

Min s'assombrit. Il préfère les femmes habillées, rien que pour le plaisir de leur ôter leurs vêtements. Tous sauf leurs dessous qu'il aime palper, griffer, écarter façon étreinte à la dérobée.

- Excitant... souffle-t-il. Comme interdit. Comme dangereux.

Min voudrait de la résistance là où il n'y a qu'abandon.

Min a l'obsession du blanc. Des dessous blancs, donc. Parce que le blanc est pur, délicat, virginal. Les modèles doivent en plus être simples, sans dentelles ni fioritures.

Et pour la matière, Min a son exigence : coton obligatoire.

Pourtant épurée, ma lingerie noire le déçoit. Pas assez candide ni virginale, sans doute.

Je pense à ces Japonais excités par les culottes d'écolière.

Je frissonne, un peu.

 

7-eleven 3Min a l'obsession de la propreté.

Pas de chaussures dans le bungalow.

Pas de pieds non rincés sur les draps.

Pas de caresses sans s'être lavé les mains.

Pour Min, une douche de dix minutes n'est pas une douche.

Alors que, peau savonnée, dents lavées et cheveux propres, je regagne le lit, lui reste à se savonner, se frictionner, s'astiquer à s'en décoller l'épiderme.

Je songe aux grands réservoirs de l'île, déjà à moitié vides en fin de saison des pluies. L'eau douce est ici une denrée précieuse, probable qu'elle soit bientôt rationnée.

Min s'en moque. Une douche de dix minutes n'est pas une douche.

Min a dû me prendre pour une truie.

Mais ça, c'est moi qui m'en moque.

 

Min s'affirme bon amant, en toute sincérité et modestie.

Il va d'ailleurs s'employer à me le prouver. À l'oral d'abord.

- In Korea... commence-t-il en butant sur la première syllabe de son pays comme s'il manquait d'entrain pour le prononcer d'un trait ou reprenait sa respiration, comme si "Korea" était une injure à scinder pour qu'elle glisse mieux.

Mais non, je m'égare.

Min a en anglais la même découpe des mots qu'en coréen. Monosyllabique, poussée d'un fort souffle à chaque entame.

In Korea (donc), one minute stand-by, thirty minutes fucking. Then, finish. Sleep.

Stand-by ? Je lève deux sourcils interrogateurs.

Min lance des bisous dans le vide, pose des paumes furtives sur sa poitrine, son sexe, son derrière.

J'ai compris. Le mot qu'il cherche, c'est foreplay (préliminaires).

Min a néanmoins raison : stand-by est plus évocateur. Là où les anglophones voient l'amorce d'un jeu, les Coréens se figurent une pause, un passage obligé leur ouvrant l'accès à leur désir.

Le droit à la pièce de résistance, en somme.

Je pouffe que le sexe made in Korea semble triste. Une minute de préliminaires, trente de fornication, éjaculation et bonne nuit.

- Yes, yes ! approuve Min. In Korea very sad ! Boring !

Mais Min n'est ni prévisible ni ennuyeux. Ni même trop directif car au lit en Corée, la femme ne bouge pas. Ou point trop.

C'est l'homme qui, prenant les initiatives, la tourne et la retourne, la plie et la ploie.

Devant mes yeux incrédules, Min empoigne un corps aussi imaginaire qu'étendu, le meut, le tord, le secoue avant de le lâcher sur le sommier.

- Aïe ! fais-je. Very painful, no ?


7-eleven 4Min est obsédé par les odeurs. Faut qu'à ses narines ça sente le frais, le neuf, le récuré.

Il faut que mais en vérité, il ne faut pas.

Le pipi doit sentir le pipi, la chatte la chatte.

Je ne souligne pas la contradiction entre les douches interminables et cette revendication sensorielle. Min ne m'écouterait pas.

Là, il lape ma sueur.

Renifle mon sexe, le lèche, s'en délecte.

Enfonce ses doigts dans mon cul, les renifle, les goûte, défaille.

Me demande de vomir dans sa bouche et de déféquer sur son torse.

Je dis non aux deux.

 

Min m'a donné une autre vision de moi-même.

Moi qui me croyais ouverte aux nouvelles expériences, j'ai reculé.

Moi qui me jugeais libérée, voilà que je me découvre coincée.

Heureusement qu'en juin, je pars en Corée !

 

 

 

* Seven-Eleven : chaîne de supérettes très présente en Asie.

 

L'image - sexuelle notamment - de la Corée n'engage que Min. Je n'ai que répété ses paroles. Pour se forger une opinion personnelle, une immersion in situ s'impose. :)  

 

Photos : Doisneau, Zang Huibin, Will Wegman.

Par Chut ! - Publié dans : Eux
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Commentaires

Merci d'tre revenue ne ligne avec de nouvelles histoires. Tu m'avais entre deux lignes évoqué ce nouveau personnage de ton panthéon mai la description est édifiante. J'imagine sa tete si il lisait le français et tombait sur ton blog.

@+

 

commentaire n° :1 posté par : Mon_xu le: 16/01/2013 à 19h58

Je ne sais pas comment il réagirait, en fait. J'aurais voulu faire passer de la tendresse dans ce portrait - car oui, Min est aussi un homme attachant - mais n'y suis apparemment pas arrivée.

Zut alors.

(Le bonjour dans ton nouveau et transitoire chez toi, Xu !)

réponse de : Chut ! le: 16/01/2013 à 20h16

peut etre aviez vous ete trop descriptive et dons l'émotion pssait moins. Vous ne 'avez pas rendu très sympatique finalement.

 

PS: cooment sais tu que je ne suis pas chez moi ?

commentaire n° :2 posté par : Xu le: 17/01/2013 à 16h15

Il faudra que je le relise le billet dans un certain temps. Difficile de me rendre compte, à chaud, de la distorsion (ou non) entre ce que je voulais faire passer et ce qui passe réellement... Puis il y a sûrement une question de sensibilité.

 

PS: tu m'avais dit que tu étais en déplacement et l'onglet "flux et reflux" (tout en bas), c'est Big Brother ! :)

réponse de : Chut ! le: 17/01/2013 à 18h22

Si, on peut imaginer que d'un point de vue féminin, le garçon peut avoir quelque chose d'attendrissant. D'où sans doute le choix de l'anaphore pour présenter le personnage et énoncer ses tics, ses tocs et ses trucs : ça fait un peu sourire de l'adulte envers son grand gamin à qui il pardonne tout, tout pétri qu'il est de contradictions mais sans complexe aucun. Cette candeur assumée le rend finalement assez sympa (ça c'est le point de vue masculin) ... jusqu'à juste avant la chute ... car là, y a comme un rideau qui tombe.

Puis-je être indiscret ? je suis curieux de savoir comment s'est déroulé l'instant d'après ? Je veux dire le moment après la demande et son refus ?

Bon, sinon c'est pas grave, on verra quand tu rentreras de Corée ...

commentaire n° :3 posté par : Slevtar le: 17/01/2013 à 17h02

"tout pétri qu'il est de contradictions mais sans complexe aucun. Cette candeur assumée /.../"... Bingo, c'est exactement ça ! Un homme complexe mais pas complexé pour deux sous, dotée d'une naïveté touchante en dépit de ses 30 printemps... mais plus dure sera la chute.


Pour l'instant d'après : il y en a eu deux, car les demandes ont eu lieu en différé.

La 1re, à la faveur d'une opportunité que Min se créa - à froid je précise, nous allions nous diriger vers la salle de bains -, ce fut caca.

Interloquée, j'ai dû lui faire répéter deux fois de peur d'avoir mal compris. Puis j'ai cru à une plaisanterie (voilà la naïveté de mon côté, pour le coup). Mais non. Et "mais non, beurk !" ai-je rétorqué d'un ton si convaincu, si sans réplique qu'il n'a pas insisté.

Il a d'ailleurs eu la mine contrite d'un élève que la maîtresse vient de taper sur les doigts.

En sus de la détente lente, je dois avoir l'humour gras car j'ai failli céder au fou rire. La demande m'a paru aussi osée que sa réaction réjouissante.

(Je précise aussi que cette pratique m'avait déjà été réclamée par un soumis, à Paris il y a quelques années, devant l'entrée d'une Nuit Elastique.

J'y avais sur le champ apporté la même réponse :

- Beurk !)

 

Pour la 2e demande, "vomi" donc, ce fut suite à un haut-le-coeur provoqué par le monsieur. Quand on s'enfonce trop loin dans une gorge, celle-ci s'en défend - action réflexe n'ayant aucun rapport avec un quelconque dégoût.

J'ai ânonné un vague "non" (pas évident de parler la bouche si remplie). Puis j'ai pensé que si Min m'agaçait vraiment (et augmentait l'ampleur de ses va-et-vient), il finirait par avoir ce qu'il désirait - ou croyait désirer.

Vu son obsession de la propreté, m'est avis qu'en fait, il en aurait été horrifié.

Vouloir est une chose, assumer une autre...

 

Cette nuit avec Min m'a vraiment évoqué le débondement d'un homme brimé, frustré par ses relations avec les Coréennes. Les rapports homme/femme ont plutôt l'air tristounets dans son pays... Ca avait du coup des allures de ressort trop longtemps comprimé qui, chouette, croit enfin pouvoir se détendre.

À noter que je suis sa première amante non Coréenne. Qu'il m'a trouvée fort, euh, libérée en comparaison - d'où, sans doute, l'espoir que je dise oui.

Pas exclu non plus qu'il ait vu trop de films pornos avec des Blanches...

réponse de : Chut ! le: 17/01/2013 à 18h52
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