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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Mercredi 2 juin 3 02 /06 /Juin 17:18

Reflets dans un oeil d'or 1Au creux de la nuit, rêve et réalité se mélangeaient. Je rêvais de lui alors que j’étais à ses côtés. Emergeais du sommeil pour le trouver étendu de biais et replongeais pour le rejoindre.


Nous étions dans un salon de danse. Toute en tentures et parquet ciré, la pièce était longue, imposante, chatoyante des reflets d’un lustre belle époque. Indifférent à ce luxe, mon ventre grondait famine.

Une femme traversa le salon avec un plateau de pâtisseries. J’ai pris une au vol mais m’arrêtai brusquement avant de la porter à mes lèvres. Me tournant vers lui posté en retrait, je demandai :

- On la partage ?

 

Nous n’avions rien mangé depuis la veille. Même pas ouvert le frigo une fois rentrés chez lui, bien après l’heure du dîner. De toute façon, il était vide.

La faim me fit battre des paupières. Oreiller rabattu sur le front, il reposait en silence. J’avais envie de suivre du doigt sa hanche jusqu’à la longue courbe de sa cuisse, ruisselant sur son corps comme l’eau de la douche.

L'eau était fraîche et ses doigts dans mon sexe, brûlants. Je gémis lorsqu’il les retira. Saisissant mes fesses, il me souleva, aussi légère qu'une plume, de terre jusqu’à sa taille. Je l’enlaçai cuisses contre flancs, genoux contre côtes, mollets contre reins, ouverte à ses mains qui, tour à tour douces et impérieuses, me caressaient, me pétrissaient, me fouillaient.

Mes chevilles se posèrent sur ses épaules. Debout dans un miracle d’équilibre, nous tournoyions langues mêlées, dos tendu contre échine pliée, libres acrobates du plaisir, danseurs fous sous les cascades d’eau.

 

Dans le salon de mon rêve aussi nous tournoyions. Sur nous-mêmes puis en larges voltes, attentifs à la musique, unis dans un même mouvement. Ici ou là-bas, nous jouions la même partition, même si nous avions dit que nous ne jouions plus. Du moins plus à ces jeux de séduction qui poussent hommes et femmes à se chercher, s’éviter, se prendre et se déprendre.

Une après-midi, alors que j’étudiais, il passa déposer un baiser sur mon épaule. J’en gardai longtemps et le goût et la trace.

Ce soir-là, lui voulait davantage que le goût et moi que la trace. Aussi, une fois déroulé le chemin de la plage, c’est naturellement que nous enfourchâmes la même moto-taxi. A trois, en parfait équilibre, sa lourde caméra pesant à droite, mon sac à gauche.

Au cours du trajet ses doigts se nouèrent sur ma gorge. Je me lovai contre son torse en souhaitant qu’il serre plus fort.

 

Serrer, le serrer, le toucher, non, pas maintenant. Maintenant ne surtout pas le déranger alors qu’il nous reste si peu à dormir.

Yeux ouverts, yeux fermés. Ouverts ou fermés, il est de tous mes espaces.

Corps diffracté dans mon cerveau, chair éparpillée en miroir.

Je me penche sur son reflet. Il me sourit.

C'est l’aube et en miroir nous sommes, sexe contre bouche, bouche contre sexe.

 

Reflets dans un oeil d'or 2Plus tard, dans la lumière étincelante du matin, je m’arrête, saisie.

Il se tient face à l’évier de la cuisine. La pièce est vieille, le carrelage fané, l’évier jauni. Une batterie de casseroles fatiguées, culs noircis, pend au mur. Le long des étagères s’empile de la vaisselle ébréchée.

Dans ce décor suranné, la lame du rasoir glisse, rapide, sur ses joues. Un miroir placé sur le plan de travail renvoie son reflet. Je le vois tour à tour de trois-quarts, hanches ceintes d’un sarong noir, et de profil, nu à l’exception du tatouage ornant sa poitrine.

 

La juxtaposition temporelle est aussi étrange que poétique. Aussitôt je regrette de ne pas avoir d’appareil pour capturer cet instant-là. Je songe à la photo de Willy Ronis montrant une femme d’un autre temps à la toilette, à cette photo et à sa petite phrase si juste :

« Je n’ai jamais poursuivi l’insolite, le jamais vu, l’extraordinaire, mais c’est ce qu’il y a de plus typique dans notre existence quotidienne. »

 

      Petite musique pour une partition du matin.

La photo est de Willy Ronis.

Le titre est emprunté au roman de Carson McCullers, porté à l'écran par John Huston en 1967.

Par Chut ! - Publié dans : Eux
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