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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Dimanche 6 décembre 7 06 /12 /Déc 13:48

Nous étions sur le pont supérieur du ferry lorsqu'une touriste française me demanda :
- Est-ce cette île ou la prochaine ?
Je me penchai par dessus le bastingage.
Tout autour de nous, la mer.

Derrière, un soleil éclatant dans un ciel bleu layette.

Droit devant, encore noyée par la distance et à peine embrumée de nuages, le contour d'une terre.
À mesure des vagues, je reconnus l'enseigne jaune du magasin d'optique étirée en étendard de bienvenue.
- Oui, c'est ici, dis-je.

Je vis le ponton s'avançant dans la mer. Le fronton du centre de plongée où travaille Ethan. Puis, alors que le bateau accostait, sa silhouette se découpant sur la foule. Je ne distinguais pas encore son visage ni ses pieds nus, juste son tee-shirt claquant au vent.
Je pensai que cet homme m'attendait au bout du monde
depuis des mois. Depuis que je lui avais dit que je reviendrais et, plus encore, que je revenais non pour partir mais rester.

Je pensai que si j'étais là, sur ce pont battu d'embruns, c'était grâce à lui.
Je pensai aussi à tous ces signes convergeant dans une unique direction pour me pointer cette île comme point d'achèvement ou de nouveau départ, comme piste d'atterrissage après un long périple ou base arrière pour un nouvel envol.
Les vendredis 13,
les chats noirs, les échelles sous lesquelles il ne faut pas passer m'indiffèrent, et pourtant... je suis superstitieuse. Mais à ma façon. Je crois aux signes du destin semés tels des cailloux sur ma route par un petit Poucet en ange sur l'épaule.
Ainsi ma vie est-elle parcourue de "coïncidences", de "hasards", de "rencontres fortuites".
Un exemple parmi mille : exception faite de l'année, Andrea est né le jour de la mort de la mère et je suis née le même jour que son frère.

Lorsque je vins pour la première fois sur cette île, je vis ma mère sur le bateau. Et pas seulement elle mais moi enfant, accompagnée du frère que je n'ai jamais eu.
Lorsque j'en partis pour la dernière fois en août et déballai mes affaires, des milliers de kilomètres plus loin aux Philippines, je tombai sur un mot laconique d'Ethan :
"Did you find the ring ?"
Je m'étonnai.
La bague ? Quelle bague ?

Des hommes m'ont déjà offert des parfums, des foulards, des livres, des briquets ou des gants que souvent, à mon grand désespoir, je m'empressai de perdre.

Jusqu'à présent, un seul homme m'offrit une bague, ou plutôt deux.

La première était cachée sous ma serviette au restaurant. Elle était belle, exactement comme je les aimais, lourde et sertie d'une grosse pierre mate.

Je faillis cependant la lui rendre. Nous ne nous connaissions que depuis quelques jours.

La deuxième se trouvait dans la boîte à gants de sa voiture. Elle avait beau être plus fine, plus racée, je l'aimais moins.

 

Je me souviens encore de cet après-midi où, allongée sur le canapé de l'appartement obscur de cet homme, je m'amusais à tourner la bague pour capturer les rayons du soleil d'automne.
- Ce verre taillé est étonnamment lumineux, commentai-je.
- Sûrement parce que c'est un diamant...
Un diamant ?

Gloups.

Je me trouvai soudain conne à confondre l'incomparable.

Me redressant, je bafouillai pour me rattraper :
- Tu... Tu as bien fait de choisir une monture en argent. Je n'aime pas le doré, je n'en porte presque jamais.
- Sauf que c'est de l'or blanc, ma chérie.
Je le fixai d'un œil rond.
Un diamant, de l'or blanc ?
Mais pourquoi une bague si précieuse, à moi qui éparpille mes affaires à tous les vents ?
Je le savais en refusant de l'entendre :
ce cadeau était le symbole d'un amour que je refusais. Abasourdie, je ne savais même plus quoi dire.
Lorsque je montrai le bijou à Salomé, elle explosa de rire.
- Mais c'est une bague de fiançailles !
- Un solitaire, qu'on l'appelle même... dis-je en me renfermant dans le silence.
Cette bague me gênait comme un lien forcé. Du coup ne la portais-je que très peu et surtout pour lui faire plaisir, à lui qui me l'avait offerte.

Ainsi, à la lecture du mot d'Ethan, ma première réaction fut-elle de sursauter.
Une bague ? Quelle bague ?
Je retournai mon gros sac de voyage, puis mon petit sac à dos sans davantage de succès.
Ce n'est que bien plus tard que je la découvris, enserrant le cable de mon ordinateur. Gravés sur un épais anneau
d'argent, des éléphants.
Je souris.

 

De bagues et de signes 3Mon surnom dans la bouche d'Ethan pourtant rétif au français, c'est taupiphant.

Un mélange de la taupe pour ma myopie galopante et de l'éléphant pour ma grâce coutumière, ma manie de tout renverser sur mon passage, de me cogner dans les meubles et de me faire des bleus, de vouloir chatouiller tandis que, inconsciente de ma force, je malaxe, je pétris, j'écrabouille.
Mon amie Ether le sait, Ethan le sait et moi aussi : sous mes allures de femme délicate, presque fragile, gît un bourrin. 
Un cauchemar de convive finissant le repas repeinte de sauce, mangeant son pot-au-feu à la ficelle en projetant des morceaux de viande aux alentours.

Un cauchemar de voisine tirant les braves gens du sommeil à coups de talons dans l'escalier.

Un cauchemar de passagère déglinguant une bagnole en claquant la porte à la volée.
Combien de fois Ether me dit-elle "Tsss... Doucement !" et que je lui répondis, étonnée :
"Quoi ? J'y suis allée trop fort ?"

La bague aux éléphants, Ethan me jura ne pas l'avoir achetée, mais trouvée par hasard, un jour de ménage, dans un coin poussiéreux de sa maison. 
Je le crus sans difficulté. Cette bague fut un signe de plus à ajouter aux autres, un de ceux qui me fait penser que sur cette île je suis au bon endroit, à la juste place de mon alignement intérieur.
En paix, enfin.

 

Pin up de Gil Evgren.

Par Chut ! - Publié dans : Bribes perso
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