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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • Le blog de Chut !
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  • 02/03/1903
  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Samedi 4 septembre 6 04 /09 /Sep 16:40

Après la pluie 10Stefan rit, un peu désorienté. Pas de culotte ? Il ne s'y attendait pas.

Sous d'autres climats, j'aurais simplement mis un porte-jarretelles, mais mes dessous les plus affriolants se racornissent dans mes placards parisiens.

Pour sa part, ce détail lui était indifférent, sa curiosité n'étant pas aiguisée par les fanfreluches de dentelle mais par mes instruments de douleur.

Pour la mienne, ce regret n'en était pas vraiment un, ni le climat ni ma nouvelle vie ne me permettant cette coquetterie.

 

Il plongea les mains sous mon débardeur, comme afin de vérifier que je portais un soutien-gorge.

C'était le cas. De quoi le soulager à demi.

Ses mains n'osaient cependant pas encore s'aventurer le long de mon ventre. L'élastique de mon pantalon semblait une barrière infranchissable, l'ultime limite séparant "le dernier verre" de la transgression.

Les mots n'engageaient à rien. Un baiser apéritif non plus. Même ployé contre moi, sexe érigé contre mes fesses, il pouvait toujours me repousser, se lever et conclure :

- Je pars.

Il le pouvait, oui. Mais j'étais certaine qu'il ne le ferait pas. Sa liberté, Stefan ne souhaitait pas l'user à s'enfuir mais à rester, en tête-à-tête avec une fille sans culotte, perchée sur ses genoux dans une maison foutraque.

Là était sa révolution à lui. Dérisoire à l’échelle d’une quelconque guerre, mais cruciale pour le combat intérieur qu’il menait, pied à pied, depuis le début.

Je sonnai l’armistice en le privant de mes lèvres. Puis déclarai à nouveau la bataille, mordillant le lobe de ses oreilles, taquinant sa nuque, tirant ses cheveux, avec précaution puis plus fort, sans qu'il ne proteste.

Encouragée par son abandon, je chuchotai :

- Et si c'était moi qui t'attachais ? Qui abusais de toi ? Puisque tu as envie une nouvelle expérience, celle-ci en serait une...

Aussitôt il se figea.

- Euh... Mais... Ce n'est pas ce qui était prévu...

Je faillis éclater de rire. Notre accord n'était pas coulé dans le marbre. Il supporterait bien une bascule impromptue, aussi brutale que le mouvement de mes hanches collant son échine aucanapé.

- Sûr ?

- Mmmh...

- Très bien, je n'insiste pas.

Je me relevai pour tendre une main qu'il saisit.

- Passons à côté, veux-tu ?

- Je veux.

Stefan m'attira contre lui. M’accrochant à ses épaules, je bondis et l'entourai de mes jambes afin qu'il me porte jusqu'à la chambre. Ainsi suspendue, je fredonnai, insolence aux paupières, la mélodie du mariage. Pensai à cette publicité idiote où le jeune époux, tout à sa hâte de rejoindre la couche nuptiale, cogne le crâne de sa dulcinée contre le chambranle de la porte.

Drôles d'épousailles, en vérité, que celles d’une femme en sarouel fuchsia et d’un homme en short kaki. Mais qu’importait la tenue, puisque bientôt nous serions dépouillés de nos oripeaux.

 

Après la pluie 11Stefan me déposa doucement sur le lit, genoux en terre tel un chevalier devant sa Dame.

- Aide-moi !

M’appuyant sur le bord du sommier, je haussai la taille. Le tissu glissa sur ma peau, dévoilant mon nombril et la courbe déclive de mes os.

- Encore…

La naissance de mon pubis apparut, mince toison châtain découpée sur un triangle pâle.

- … Plus bas…

Mes cuisses surgirent. Striées de muscles tandis que, d’un arrondi de genoux, je fis voltiger le sarouel. Celui-ci atterrit aux pieds de Stefan qui, accroupi, immobile, me regardait.

- … S’il te plaît…

Le débardeur frétilla par-dessus mes épaules. Dégrafé, le soutien-gorge se cropetonna contre les oreillers. Traversant la rambarde ajourée sous le plafond, la lumière du salon dessinait sur ma peau un impalpable damier.

- Tes vêtements sont si larges que je ne devinais pas ton corps…

- Et… ?

- Et je te préfère nue plutôt qu’habillée.

 

Je roulai sur moi-même aux confins du lit.

- Aide-moi !

Stefan me remit d’aplomb, étonné de me voir soudain lui tourner le dos.

- Où vas-tu ?

- A deux pas. Choisir l’attache qui va m’emprisonner, en vertu de l’accord qui me lie à Monsieur.

La penderie ouverte, j’hésitai.

Ma large ceinture en cuir me tentait. Je la repoussai. Trop solide, donc trop dangereuse alors que je ne connaissais pas assez cet homme. Mon intuition avait beau me souffler que je n’avais rien à en redouter, pas question de courir le moindre risque. Si jamais le jeu l’emportait, il fallait que je m’en délie pour riposter.


Soupesant les étoffes, je songeai aux câbles abandonnés derrière la télévision. A l’expérience avortée et tant désirée avec Feu mon amour.

La contention. Les pinces. L’électricité. La gégène consentie.

Lui souriant, à la fois incrédule et intéressé. Moi blottie contre lui, à la fois ivre et honteuse de mes fantasmes tordus, me reprochant d’être excitée par ce que d’autres, en d’autres temps, avait subi en torture, passant et repassant devant la machine, questionnant le vendeur qui jamais ne l’avait essayée.

- Vous me raconterez… souffla-t-il.

Il n’y eut rien à raconter. Nous sortîmes du sex-shop les mains presque vides.


Non. Les câbles métalliques n’étaient pas une bonne idée. Pires que la ceinture en cuir, il ne permettrait pas de me délivrer.

Mais ce que je touchais, là, maintenant, était parfait. Assez lâche pour laisser du jeu à mes poignets comprimés. Assez souple pour, d’une simple rotation de bras, me rendre à ma liberté.

- Voilà ! j’ai trouvé, dis-je.

Décrochée de son cintre, la ceinture de la robe achetée avec Ethan à El Nido tomba sur le plancher.

Jamais le vendeur ne lui aurait imaginé un tel usage. Moi non plus, d’ailleurs.

 

 

Photos, respectivement : Robert Mapplethorpe, John Carroll Doyle.

Par Chut ! - Publié dans : Eux
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