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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Lundi 16 août 1 16 /08 /Août 07:55

Apres la pluie 7Le lendemain, en journée, j'eus des nouvelles de Stefan. Il aurait souhaité me voir en soirée mais n'était pas libre.

Dès le crépuscule, des cascades d'eau s'abattirent sur la maison. Je me repliai frileusement au salon en redoutant une coupure d'électricité. Depuis une semaine, celles-ci arrivaient à la nuit tombée, rendant la terrasse impraticable et m'obligeant à allumer des bougies pour me déplacer d'une pièce à l'autre.

Souvent elles ne duraient pas, mais leur longueur était imprévisible. Elles pouvaient tout aussi bien prendre fin en dix minutes comme se prolonger jusqu'au matin, me privant d'air pulsé pour rafraîchir la nuit.


Il y eut soudain un grand clac. Les pales du ventilateur se mirent à tourner au ralenti. Les plafonniers s'éteignirent. Je tâtonnais dans le noir profond pour trouver mon portable. La mince lueur de son écran me permettrait d'arriver jusqu'aux bougies, à côté de l'évier.

Sous mes doigts l'appareil trembla.

J'avais un nouveau message. Stefan qui me parlait d'enfourcher sa moto. Qui se désolait qu'il pleuve à verse, en une désagréable réédition de la veille où il revint trempé au bercail. Avec ses amis, il logeait à quelques minutes de ma maison. Et d'ici à la ville, il y avait une demi-heure de route, largement de quoi rentrer sans une once de peau sèche. De quoi, aussi, avoir un accident sur les routes glissantes.


Le supposant loin puisqu'il avait une soirée de prévu, je lui souhaitai un bon retour. Etonnée, toutefois, qu'il m'informe de ses déplacements. Un bref instant le doute me chatouilla :n'avions-nous vraiment pas rendez-vous ? N'y aurait-il pas un malentendu ?

Ma réponse à peine envoyée, je me traitai d'imbécile.

Si Stefan me donnait toutes ces précisions, n'était-ce donc pas qu'il projetait de se rendre... chez moi ?

La lumière se fit dans ma tête comme au salon. Sans crier gare, le courant s'était en effet rétabli, m'éclaboussant d'une clarté trop franche. Téléphone en main, je papillotais des yeux perchée tel un échassier au milieu du salon.

Au message suivant, il me demanda où se situait la maison. Je proposai de l'appeler pour en parler de vive voix. Même pour qui connaît le coin, elle reste difficile à trouver.

Il accepta. Je détaillai la route à prendre, lui parlai du portail bleu, du sari-sari des Figueras et de ses bancs rouges.

- D'accord.

- Quand penses-tu arriver ? questionnai-je en glissant un regard sur la pendule.

 

Déjà onze heures et j'étais fatiguée de la veille comme de ma journée. La réponse de Stefan me stupéfia. En fait, il ne comptait pas venir.

- Quoi ?? me retins-je de crier.

Cet homme voulait savoir où j'habitais. J'avais passé dix minutes à le lui expliquer, sans qu'à aucun moment il ne m'interrompe.

Et tout ça pour quoi ? Pour qu'il me dise "non merci" !

Moi qui croyais connaître la large palette des comportements masculins, je n'avais rien deviné, rien pressenti. Je devais à présent y ajouter une couleur, mais laquelle ? Jaune tiédasse ou vert fumasse ?

Partagée entre colère et fou rire, je pensai :

- Tu devrais voir ta tête...

Ce que je fis dans un miroir, sourcils levés en virgules et bouche arrondie en point d'interrogation.

 

Après la pluie 8Une heure plus tard, je bavardais avec Ether lorsqu'un ultime texto déboula.

- Ton téléphone a sonné, me fit remarquer mon amie à dix mille kilomètres de distance.

- Mmmh. Tu as raison. Attends deux secondes.

J'ouvris le message. Stefan y évoquait mes placards parisiens. Agacée, je l'effaçai sur le champ. 

En retrouvant mon lit, je songeai qu'en matière d'hommes, on est rarement au bout de ses surprises. Et que finalement, mieux valait ça que l'inverse.

 

Le jour d'après, j'étais attablée avec Bertille à notre repaire de la plage. Elle eut droit à la primeur de l'histoire. Ouvrit de grands yeux et hoqueta de rire.

- Et tu t'es couchée... comme ça ?

- Ben oui. Que voulais-tu que je fasse ? Le traîner chez moi par la peau du dos ?

Au fil de nos papotages, nous élaborâmes un nouveau concept de séduction : l'effet d'annonce déçu, alias le "oui d'accord mais". Dire à l'autre ce que, de plein gré, on aurait pu faire, juste pour lui préciser qu'on ne le fera pas. Le tout suivi d'un merci ou d'un désolé, avec un "à la prochaine" en option.

Nous en étions là lorsque mon portable bipa.

- C'est lui. Il n'a trouvé ni portail bleu ni bancs rouges sur la route.

- Ah ah ! s'esclaffa Bertille. Monsieur honorait donc votre non rendez-vous... avec vingt heures de retard !

Et tandis que mes lèvres prononçaient "je renonce", mes doigts tapotaient : "rejoins-nous."

 

Il s'exécuta, en apparence sûr de lui avec sa haute taille, ses traits réguliers et ses iris océan. Alignées en brochettes derrière le bar, les serveuses le mangeaient des yeux. Lui ne semblait pas les voir. Debout face à nous, peut-être souriait-il un peu trop, comme pour masquer sa gêne.

Je lui proposai de s'asseoir, il ne pouvait pas rester.

- Une soirée au programme ? s'enquit ingénument Bertille.

Il ne démentit ni acquiesça. Seuls l'absorbaient le portail bleu et les bancs rouges. Je réexpliquai la route lentement.

- Mais je ne les ai pas croisés sur le chemin, s'entêta-t-il.

- Tu es en moto ?

- Oui.

- Parfait, allons-y. Ensemble.

Je me levai. Il me suivit. Assise derrière lui, je voyais sa nuque se courber et poindre les muscles de ses épaules. Brusque envie de les emprisonner sous mes paumes pour descendre jusqu'à ses cuisses serrées entre les miennes.

Me penchant, je chuchotai à son oreille en effleurant sa peau :

- Et si je te mordais maintenant ?

Il marqua un bref silence.

- Si tu me mords, nous allons tomber.

- Je m'abstiens, alors.

Tenant parole, je songeai que, décidément, ce n'était pas gagné.

Mais que me voulait donc ce garçon ?

 

 

(A suivre)

Photos, respectivement : Jeanloup Sieff et André Kertesz.

Par Chut ! - Publié dans : Eux
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