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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • 02/03/1903
  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Lundi 27 juillet 1 27 /07 /Juil 01:13
Cet homme-là, il n’y a qu’une fois qu’il ne m’a pas fait pleurer.
C’était la première.
La seconde, il avait l’air grave. La troisième, consterné. La quatrième, flou, car je me réveillais à peine. La cinquième, la sixième, la septième se sont achevées dans autant de déluges.

J’ai aimé des hommes qui m'ont fait pleurer. Lui, cependant, je ne l’aimais pas. Du moins pas comme les autres. Pour un peu, je l’aurais même haï.
Lui et sa petite taille qui me force à me baisser pour le saluer.
Lui et sa houppette de cheveux de plus en plus clairsemée.
Lui et ses belles chaussures qui craquent sur son beau parquet.
Lui qui me connaît par cœur et m'a vue comme aucun autre homme ne me verra jamais. Ouverte, retournée, prostrée, pleine de larmes, de sang et de merde.
Oui, lui, j’aurais pu le haïr.
Mais déteste-t-on son médecin sous prétexte qu’il annonce de mauvaises nouvelles ?

Lors notre dernier rendez-vous, c'est à son silence que j'ai compris. La grenouille écorchée étendue
sur la table, c'était moi qui regardais l'écran. L'image n'avait ni volumes ni reliefs, juste du blanc, du noir, du gris. Une infinité de gris éclatés en particules de gris.
- Relaxez-vous, me conseilla-t-il.
Je ne répondis rien. J'essayais de penser à autre chose.
Entre nous le silence s'étendait comme les montagnes de mon enfance. Vite, de toute la force de mes jambes,
je me faufile entre leurs hautes herbes pour me cacher. Puis tombe hors d'haleine dans un champ moussu de cailloux, caressant leur dos de coccinelles polies de vent.
- Ici, ça va.
J'avance à quatre pattes dans le lit d'une rivière. Les pierres ne sont plus douces mais tranchantes, des saletés de silex qui m'écorchent les paumes. Le plus aigu, craquant la toile de mon pantalon, me pourfend jusqu'à l'os.
- Mais là, hum... Il y a un problème.
Le sang jaillit, saccadé, de ma blessure. J'ai mal mais je ne crie pas. Si personne ne m'entend, si personne ne me voit, personne ne viendra et je pourrai croire à un rêve. Un rêve plausible d'allongée nue.

Une série de clic me contraignit à quitter ma terre d'enfance. Et bien que n’opérant aucun lien entre le truc enfoncé en moi et le magma gris sur l’écran, il était urgent que je me concentre. Parce que j’avais un problème enfermé entre quatre points.
- Non, pas là.
Il ressaisit de ses mots mes yeux égarés.
- Ici, conclut-il en pointant une tache grise. Enfin… Ici et là.
Sur l’écran, son majeur rejoignit son index. Entre eux, un écart de dix centimètres.
Lorsqu’il retira ses doigts, ça fit deux taches.
- Rhabillez-vous.
Je remontai le boulevard avec, dans la gorge, un arrière-goût de désastre.

Passé le premier choc, je ressentis
l'incrédulité d'une trahison sans signes précurseurs : mon vieux complice m'avait lâchée dans la dernière ligne droite.
Lui que j'avais nourri, soigné, malmené parfois sur les routes, poussé jusqu'à l'extrême limite de la fatigue puis chouchouté pour qu'il se refasse une santé.

J'eus envie de lui crier qu'il ne pouvait pas me rejouer ce coup-là. Qu'il n'avait pas, cette fois encore, le droit à la défaillance.
J'aurais pu hurler ma rage et mon désarroi à la face des immeubles que rien n'aurait changé. À mes plaintes, à mes imprécations, mon corps resterait sourd.

Si je lui dois certainement la patience accordée aux malades, je lui garde la méfiance réservée aux ennemis. Aux hypocrites qui vous prennent à revers. Aux sournois qui, à la faveur de l'ombre, bousillent vos plus beaux plans.

Depuis ce rendez-vous et avec plus ou moins de peine,
j'aligne le jour mon corps et mon esprit sur la même courbe.
La nuit, leur ordonnance se défait. Je rêve de chairs morcelées,
d'alliages de muscles et de machines, de silhouettes rabiotées au couteau, de femmes mécaniques, androïdes, bioniques.

Le jour de l'annonce, j'ai pleuré, serré les poings puis redonné vie à ce qui était mort.
Ce jour-là, j'ai proposé à Gaspard :
- Tu ne vas pas rentrer là-bas si tard. Viens dormir à la maison si tu veux.
Dormir, tellement je me sentais incapable d'autre chose.

Une fois rentrés, nous nous lovâmes au creux du canapé déplié.
L'envie vint lentement, vague après vaguelette, tandis que ses lèvres traçaient de petites routes humides de mon front à ma nuque, de ma gorge à mes seins, de mon ventre à mon sexe.
Mon corps de guingois, ce qui était mort dedans, il s'en fichait bien.
Lui me voyait femme tout entière.
Et moi recomposée sous ses mains, j'étais une.
Lorsqu'il me pénétra, je renversai son visage pour voir ses yeux.

Au petit matin, Ether partant travailler pensa que Gaspard était parti. Sous le drap ne se dessinait qu'une seule forme : celle de nos corps emboîtés dans le sommeil.
Par Chut ! - Publié dans : Bribes perso
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Commentaires

Je ne sais pas si ce pseudo va encore te dire quelque chose, il m'est souvent arrivé de passer comme un voleur, sans laisser de trace, mais pour être honnête, je n'étais pas revenu ici depuis un certain temps. La qualité de tes textes ne s'est pas envolée depuis la dernière fois. Très touchant, comme toujours.
commentaire n° :1 posté par : ioreilly le: 27/07/2009 à 20h29
Oh que si, je me souviens très bien de toi ! Toute une époque, de L'Eloge de la fuite (alors ?) à John Fante, en passant par un certain grosporc, qui n'avait rien d'un gros cochon. :)
Je suis touchée que tu aies pris la peine de me laisser un message en ces temps troublés, comme je suis touchée par tes mots. Repasse quand le cœur t'en dit, écris-moi si tu en as envie.
Feel like at home.
réponse de : Chut ! le: 27/07/2009 à 20h53
L'éloge de la fuite m'a confronté aux limites de mon piteux intellect, en gros je l'ai reposé en attendant que mes neurones prolifèrent un peu, ce qui n'est pas gagné. J'ai quand même parcouru une bonne partie du chapitre sur l'amour, et si une partie de moi se reconnait dans la désacralisation de la chose, depuis quelques temps, l'autre partie fait de la résistance et prend plutot le parti de se raconter des histoires, qui pourrissent la vie bien autant qu'elles la rendent plus acceptable au fond.

Je crois que grosporc me manque, il avait l'art de ramener les choses à ce qu'elles sont ni plus ni moins...
commentaire n° :2 posté par : ioreilly le: 27/07/2009 à 21h15

Aïe, je crains que les neurones suivent la même trajectoire décroissante que la réserve ovocytaire... On est mal barré tous les deux ! Remarque, pour ce qui me concerne, je m'en doutais déjà. Et puis peut-être qu'en nous associant, on arriverait à un score correct : un "à droite toute" sur la courbe en cloche du QI, ajoutée à une nombreuse marmaille.

Je plaisante, hein. Laborit est difficile à lire et parfois très obscur, c'est un fait. Et l'amour, arf, un truc du genre inextricable. N'empêche que l'espoir ne se laisse pas aussi facilement déraciner. Il paraîtrait même que voilà unb "privilège" d'humains...

 

Ces choses-là ne tiendraient-elles que dans une lettre du clavier ? Si oui, Grosporc n'avait pas le sens de la formule, seulement celui du raccourci. Ce qui est toujours mieux que rien du tout, pas vrai ?

Ah, PS / Ton commentaire est le 400eme publié sur le blog. Et oui !!
Tu as gagné au choix... une magnifique descente de lit en fausse peau d'ours ou le droit de récrire. :)

(Je m'étais juré de marquer le coup. 400, mazette !)

réponse de : Chut ! le: 27/07/2009 à 22h38
Comme pour la marmaille je suis plutot parti pour passer mon tour, le score en ce qui me concerne va rester proche des bonnes manières de mon ami grosporc.

Les privilèges des humains feraient presque rêver d'être une descente de lit en peau d'ours, quand on s'y frotte d'un peu trop près. Presque.

J'opte pour un 401eme message finalement.
commentaire n° :3 posté par : ioreilly le: 27/07/2009 à 22h59
On dit ça, on dit ça. Tiens, en matière de "privilège" humain - et accessoirement de lieux communs -, j'en tiens un autre que je te soumets : la vie est pleine de surprises (aka, "la vie, c'est comme une boîte de chocolats...", citation extraite d'un film cul-cul la praline... histoire de filer la métaphore cul-inaire, et éventuellement de me faire lyncher par les fans de FG).

Quand on se frotte à la peau d'ours ou aux privilèges ? Si ton rêve était de finir carpette, je peux t'aider, tu sais. Il est des bonheurs simples comme des coups de martinet. Enfin, presque.

Tu as gagné la descente de cheminée. Alors, heureux ? :D 
réponse de : Chut ! le: 27/07/2009 à 23h11
Il était temps que je cesse de me lamenter, le martinet s'est pointé au bon moment. Merci :)
commentaire n° :4 posté par : ioreilly le: 28/07/2009 à 11h55
Quand je peux rendre service, c'est avec plaisir. De rien. :D
réponse de : Chut ! le: 28/07/2009 à 13h01
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