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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.
Dimanche 7 septembre 7 07 /09 /Sep 18:44
J'ai jamais aimé les dimanches.
Aujourd'hui, ça tombe mal, on est justement dimanche.

Je descends faire des courses mes cabas à la main, en vieux jeans, le chignon en crotte. Je dodeline de la tête au son de CocoRosie, me demandant bien où se cachent les Beautiful Boyz
dont il est question dans la chanson.

Au coin d'une rue, je tombe sur mon ancienne voisine. Je lui ai vécu presque trois ans sur la tête, sans oublier de la saluer dans l'escalier.
Elle, son mari, sa petite fille
m'aimaient bien, comme on aime quelqu'un qui vit à vos côtés sans vous déranger. S'ils avaient été mes voisins directs, ils auraient sûrement fini par me prendre en grippe, moi et mes manies.
Celle de ne pas dormir, par exemple.
Ou d'écouter de la musique à flux continu. Ou de beugler "Merde, putain, fais chier !" dès que je heurte un meuble. Ou de faire tomber des objets lourds à toute heure de la nuit.
Bref, je suis loin, très loin, de la voisine idéale.

N'empêche qu'en pleine canicule, j'allais arroser ses pots de fleurs. Avec minutie mais pas chaque jour, car son deux-pièces me collait le bourdon.
Partout, des photos de famille dans des cadres dorés, de petits napperons et des bibelots ramasse-poussière. Sur le canapé, un plaid en chenille. Au mur, une horloge suisse qui tic-taquait les minutes.
Déprimante déco de cinquantenaire pour de jeunes trentenaires.

Je sortais de leur bonbonnière pour regrimper l'étage quatre à quatre et rejoindre mon studio foutraque. Ils n'auraient pas vécu chez moi ni moi chez eux.
C'est parfois à ce genre de détails qu'on se dit que l'existence est bien faite. Ou moins mal qu'on ne le croit.


Ma voisine, donc. On ne s'est pas vues depuis des années, mais elle me demande des nouvelles comme si on s'était croisées hier, sur le palier ou près du local poubelles.
- Alors, ton boulot ?
Vague geste de ma part.
- Euh... Je ne travaille plus trop.
- Ah...
Elle a le sourire contraint de ceux qui ne savent sur quel pied danser. De toute évidence, elle se demande si je suis au chômage, malade, devenue l'épouse d'un roi du pétrole ou une jeune rentière.

- Tu reviens de vacances, là ?
- Non... Si. Pas vraiment, en fait.
- Ah...
Je sens à sa gêne que je suis de plus en plus incompréhensible.
- Je pars bientôt... Enfin, avant l'année prochaine...
- En Inde ?
- Non, plutôt en Thaïlande... en Mongolie... au Japon...
J'énumère les pays qui me trottinent dans la tête, la voix hésitante et les mains floues.
- En vérité, je ne sais pas.
- Ah...
Une drôle de lueur passe dans ses yeux. Une lueur qui me dit que, soudain, je tiens davantage de l'extraterrestre que de l'ex-voisine.

- Et tu partirais longtemps ?
- Oui, je crois... Deux mois, trois mois, six... Je sais pas.
- Ah...
Dans ses yeux, la lueur a changé. Ce n'est plus de la surprise ou de l'apitoiement devant mes faibles réponses.
C'est autre chose, mais quoi exactement ? Je ne sais pas.
De l'envie, peut-être.
Parce que le luxe de voyager longtemps, sans savoir où à l'avance, m'est accessible.
Parce que je peux partir sur un coup de tête si ça me chante.
Ou parce que je peux
tout simplement partir.

Dit comme ça, ça fait drôlement envie, je comprends.
Mais dit autrement, ça peut être moins drôle : si je pars loin, longtemps, c'est que je n'ai ni mari, ni enfant, ni famille, ni attaches autres qu'amicales.
Que je ne dépends de personne ni personne de moi.
Que je suis libre, entièrement. Libre de voyager comme de rester, de sauter dans un avion comme de ma fenêtre.
Posé comme ça, je parie que ma voisine n'échangerait pas sa vie contre la mienne.

C'est parfois à ce genre de détails qu'on se dit que l'existence est bien faite.
Ou moins mal qu'on ne le croit.

Par Chut ! - Publié dans : Au jour le jour
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