Dans ces bras-là...
Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.
Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire
comme jamais.
Camille
Laurens.
Décembre 2024 | ||||||||||
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Pendant plus de deux ans, je me suis impliquée dans la section HIV-sida-prévention d'un forum aussi connu que
fréquenté.
J'ai passé des heures rivée à l'écran de mon ordinateur, à répondre aux questions de routine, à rassurer les angoissés (il y en avait toujours la nuit, et la nuit, je ne dors pas), à remonter le
moral à des déprimés.
Cela dit, je ne me décerne aucune médaille. Pour la simple raison que je n'en mérite pas.
Avant d'arriver sur le forum, j'avais des connaissances précises mais basiques sur le virus.
Je savais par exemple les modes de contamination (ni par contact, masturbation, baiser ou fellation reçue, au passage...) et le risque de transmission. Celle-ci étant très loin d'être
automatique, et bien en deçà des chiffres que les gens se figurent.
Mon savoir été affiné par les intervenants réguliers, bien plus calés que moi. La plupart ne fréquente plus le site, mais je les en remercie.
J'ai une dette envers eux.
Durant ces années, je n'ai jamais été seule. Entrée sur le forum par la petite porte et sur la pointe des pieds, j'avais conscience qu'il existait un noyau dur : un groupe d'intervenants
motivés, toujours présents, liés par une histoire commune et un combat actif
contre les préjugés.
Ils m'ont acceptée parmi eux.
Au fil du temps, des pseudos sont devenus des amis. Virtuels pour la plupart, ce qui n'empêche ni la sympathie, ni la franche rigolade, ni la rigueur.
J'ai perdu le contact avec certains, mais qu'importe. Ils sont là, présents.
Le forum m'a apporté bien plus que le temps qu'il ne m'a pris. Grâce à lui, j'ai rencontré des personnes formidables, qui
n'économis(ai)ent ni leur énergie, ni leurs heures à aider, orienter, témoigner.
Ensemble, c'est tout.
Et nous formions une fameuse équipe, soudée par la volonté de soutenir, d'informer, de lutter contre les idées reçues.
Ce fut l'âge d'or du forum. Un moment de cohésion et de grâce. De partage absolu et de rencontres réelles. De moments forts et de
vraies amitiés (coupine, couz', Poussin, si vous m'entendez...).
Puis des personnes sans âme ni scrupules (trolls en jargon
Internet) sont arrivées. Ont cassé notre motivation, saccagé notre travail, ruiné "notre" forum et humilié ses
intervenants.
À nos yeux, il était infiniment plus qu'un espace virtuel. L'attaquer revenait à nous meurtrir.
Nous en avons pleuré, de rage et d'impuissance. Passé des journées et des nuits blanches à lutter pied à pied, arguments contre mauvaise foi, besoin de rétablir la vérité contre envie
d'en découdre.
Sur la toile, les lâches tissent la leur en se gardant la part du lion.
Aujourd'hui, la blessure se referme à peine.
Mais ici ou ailleurs, HIV + ou -, la lutte continue.
Photo : William Wegman.
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