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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

Tic tac

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Mercredi 9 janvier 3 09 /01 /Jan 01:52
Vous tombez sur cette page avant La Caresse en paire de claques (1) et (2) ? Remontez un peu !

2 - TACOTAC

Au TacOtac de l’amour, « une chance au grattage, une chance au tirage », je croyais avoir tiré le bon numéro. Bercée par les affichettes des tabacs annonçant chaque semaine un super gagnant, j’avais cru lire mon nom en toutes lettres. La faute à cette myopie galopante que mon ophtalmologiste renonce à
opérer et s'acharne à corriger : on ne se refait pas si facilement.
Poker et psychanalyse, même combat.
Jouer franc jeu, voilà une belle phrase... sur le divan ou dans les romans. Car à l’heure des cartes sur table, croyez-moi, mieux vaut se garder une poire pour la soif, un os à ronger et un as dans le revers de sa veste.
Histoire de mieux prendre celle qui suit.
Entre le pigeon et le dindon, il y a toujours une histoire de farce. Et la différence ne tient qu’au livre de recettes. C’est trop tard qu’on s’aperçoit à quelle sauce on a été accommodée puis mangée. Alors, si un expert ès plats du jour vous invite à visiter les cuisines, refusez tout net : il s'y trouvera toujours un gâte-sauce pour vous précipiter dans la marmite, là où il vous en cuira.

Dans notre début de parcours, ma route et celle de Dermott - l’homme tronc - n’avaient rencontré ni feux rouges, ni déviations, ni sens interdits. La ligne à ne pas franchir étant encore loin, nous
convergions vers un proche embranchement.
Marche avant toute, sans ratés ni accrochages.
Le deuxième jour, après l’épisode des poils de chien, je tournai la clef de contact et lui offris mon premier cadeau : un briquet rouge. Couleur de l’amour pour allumer sa flamme et ses cigarettes.

Le troisième jour, débrayage. J’étais d’humeur mélancolique et Dermott de passage. Notre tête-à-tête prit des allures de tête-à-queue. Il partit pour l’exposition d’une obscure artiste Chinoise. Je restai face à un sombre sentiment de fête manquée, une chaise et deux tasses vides. J’aurais bien bu à la sienne dans un baiser froid, mais je m’abstins. Je me contentai de rafler les sucres de sa soucoupe et en bourrai Socrate.
Le plus content de nous deux, c’était bien lui.

Le quatrième jour, nous passâmes à la vitesse supérieure, en roue libre et au régime du tout permis. Une page arrachée à un agenda et roule ma poule : Dermott avait mon numéro, moi le sien, histoire d'enrichir mon opérateur et sa collection de coups de fils.

Au sixième jour, il était temps d’appuyer sur le champignon. Je l'appelai. Il décrocha.
Grésillements. Friture sur la ligne en guise de coup de feu inaugural. Salutations sur les starting-blocks, égrènement des « Ça va ? » pour partir du bon pied, courtes phrases dans une
rapide foulée. Nul besoin de second souffle pour connaître l’euphorie de la course de fond. J’ignorais encore que la nôtre se jouerait sur quatre cents mètres - la distance de chez lui à chez moi - et non sur un marathon.
De fait, cinq minutes suffirent. Quand le désir s'en mêle, les longs discours sont inutiles.
Fesses sur le parquet et combiné raccroché, je remerciais France Telecom qui simplifie la vie des gens (mais allait compliquer la mienne), Socrate et son incontinence capillaire. Mais ce jour-là, ma gratitude eut des limites : la tournée de vessie canine serait pour plus tard. Conviée à sabler le champagne, je refusais de trinquer dans le verre du quotidien.
Remisé dans son panier, Socrate me regarda vider les lieux les yeux humides. Eh oui, le bonheur est égoïste et les chiens fidèles, le mien est bien payé pour le savoir.

Avec Dermott, nous projetions d’aller au cinéma. Tartuferie des débuts. Au lieu de me diriger vers une salle obscure, je cinglais vers son appartement.
Deux cents mètres de piste balisée dans le tout droit-à gauche-traverser sans regarder et, déjà, la respiration me manquait. Un simple accident de parcours et j’achèverais mon tour de piste face sur le trottoir. Alors… adieu veau, vache, cochon.
Perspective aussi réjouissante que de me jeter du cinquième étage duquel j’étais descendue.
Pour une soirée placée sous auspices animaliers - Socrate exclu - c’eût été vache, voire rosse.

Six-neuf, rue de la Croquette. J’arrivai enfin, déchirant le ruban de la victoire.
Dermott m’avait indiqué les codes de ses portes d’entrée.
« Homme bien gardé en situation d’ouverture », pensais-je en pianotant sur le clavier métallique.
Mais en cette matière, nous allions nous borner au matériel. Au bois, au fer, à l’acier trempé. À un tout ce qui vous blesse, vous glace, vous brise le nez.

Trois étages, trois coups pressés. Sa porte s’ouvrit.
Aucun doute possible : nous étions seuls et Dermott toujours aussi grand. À hauteur de baiser, son sternum ou son tee-shirt, incongrus pour une première prise de contact.
Je me bornais donc à l’embrasser du regard. Il se plia en quatre pour atteindre ma joue. Principe biblique oblige, je lui tendis l’autre en un recueillement parfait.
Il ne manquait plus que les grandes orgues pour commencer la messe.
Elles se turent néanmoins. Côté musical, Dermott ne vibrait que sur la fibre païenne. J’avais choisi le vin, il avait choisi la musique. Preuve qu’il voulait accorder nos violons. Mais dès l’introït se profilait le couac : ce qui tournait en boucle sur sa platine m’était aussi étranger que la demi-mesure.
Je prêtais l’oreille, toutefois. Je n’aimais pas, pourtant. Le broken beat branché dont il faisait ses délices n’était décidément pas dans mes cordes.
Si j’avais su, je lui aurais demandé de changer de disque.

Ce soir-là, Dermott passa l’éponge sur mes débordements. Encore une histoire de maladresse, involontaire cette fois : d’un coup de talon, je renversai sans le casser mon verre en le levant.
Ce soir-là aussi, je fus présentée à ses plantes vertes, ses photos, sa lampe à cire. Une lampe qui chauffe à mesure que la tension monte, libérant des formes phalliques qui s’élèvent en apesanteur. Complices, nous commentions la levée des pénis comme d’autres les passes d’un match de foot.
Ce soir-là enfin, nous passâmes une délicieuse soirée autour de nos verres pleins. Et si j’étais ivre, ce n’était ni de musique ni de vin.
In vino veritas.
La vérité sonna à deux heures du matin, lorsqu'il m’empoigna. Je ne songeai même pas à protester. On se défend rarement de ce que l’on a longtemps attendu. On devrait peut-être, par principe de précaution. Mais, oubliant d’assurer mes arrières, je tombai en avant dans ses bras sur le carrelage froid.

La douceur de sa bouche me fit redouter le pire. Le pire, c’est que la suite allait être bien.
Mieux que bien, même.
Par Chut ! - Publié dans : Nouvelles et essais
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