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En lisant, carnet de bons mots

Dans ces bras-là...


Ça tombait bien, au fond, cette foudre me transperçant à la terrasse d'un café, c'était un signe du ciel, cette flèche fichée en moi comme un cri à sa seule vue, cette blessure rouvrant les deux bords du silence, ce coup porté au corps muet, au corps silencieux, par un homme qui pouvait justement tout entendre.

Il me sembla que ce serait stupide de faire avec lui comme toujours, et qu'avec lui il fallait faire comme jamais.


Camille Laurens.

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C'est pas la saint-Glinglin...

... Non, aujourd'hui, c'est la sainte-Aspirine.
Patronne du front lourd et des tempes serrées, des nuits trop petites et des lendemains qui déchantent.
L'effervescence de ses bulles, c'était la vôtre hier.
Aujourd'hui, embrumés, vous n'avez qu'une pensée : qu'on coupe court à la migraine... en vous coupant la tête.

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Mercredi 26 mars 3 26 /03 /Mars 02:02

Filtre 2Pas de relations sociales, familiales, parentales - humaines, en un mot -, sans filtre : on n'étale pas nos problèmes de couple à notre patron, nos histoires de fesses à nos parents, nos griefs contre notre compagnon à nos enfants.
Enfin, normalement, on ne devrait pas.
Le filtre permet d'assigner à chacun sa place, puis de l'y asseoir :
"Vous êtes mon supérieur, mes parents, mes enfants, pas mes copains".

De fait, avec vous et
sur certains sujets, une retenue est de mise.

Cette retenue peut s'appeler politesse. Surtout, ne pas indisposer les autres par des confidences gênantes, une (sur)exposition de soi-même inappropriée. Lire l'embarras dans leurs yeux, les voir se trifouiller les neurones à la recherche d'une réponse convenable, qui aboutit souvent à un lieu commun :

"Y a des hauts, y a des bas."
"La vie n'est pas un long fleuve tranquille."
"Ce qui ne tue pas rend plus fort."

 Cette retenue peut également s'appeler souci de l'autre. Surtout, ne pas lui glisser dans le dos la main froide de nos doutes, ne pas l'alourdir du poids de nos problèmes. Il a déjà assez des siens pour s'épargner les nôtres en prime. D'autant que souvent, il est incapable de nous aider. Son rôle est celui de l'écoute, de l'empathie.
Ce qui est en soi beaucoup, je ne le nie pas.
Mais ce
tte retenue, c'est aussi le quant-à-soi de la protection. Là, plus de courtoisie ni de délicatesse qui tiennent. De tamis, le filtre devient vernis. C'est la couverture dont on s'enveloppe pour se dissimuler, l'armure qu'on enfile pour parer les coups.
Car discuter à bâtons rompus avec des personnes mal choisies revient vite... à se prendre les bâtons sur le nez.

Moi, je crois, j'ai un problème de filtre. Peut-être pour avoir été
trop rabrouée petite, je ne sais pas toujours où mettre le mien, du moins dans mes relations affectives.
Dès que l'autre me touche de très près, je sens le danger et m'interroge :
"Vais-je lui parler de ci ou de ça ?"
"Maintenant ou plus tard ?"
"Et quelle sera sa réaction ?"
La politesse, la délicatesse, le désir - ou plutôt le besoin - de me protéger s'emmêlent dans ma tête. Grosses pelotes de nœuds dont j'ai perdu le fil. D'ailleurs, j'ignore même sur lequel tirer pour dévider l'écheveau.
Bien souvent, par le passé, je ne disais rien. Je me renfermais, accumulais, encaissais. Pratiquais malgré moi la rétension d'informations. Au fur et à mesure, mon filtre se chargeait de scories et de saletés. Jusqu'au jour, rempli plus qu'à ras-bord, il finissait par céder.
La coupe était pleine, comme on dit.
Ou, comme on dit encore, je n'étais plus étanche.
Les vannes s'ouvraient sans que j'en contrôle le débit. En jaillissait un flot d'une grande violence, charriant tout ce qui n'allait pas, déversant tout ce que j'avais tu. Hurlante, blessante, les poings fermés sur ma colère, les larmes aux yeux.
En face, il y avait de quoi en rester sur le cul.

À présent, j'essaie de ne plus laisser mon filtre
s'encrasser. Enfin, pas trop, car pour moi, le nettoyer est une lutte. Me taire m'est en général plus facile que de dire, sauf qu'à la longue, me taire m'étouffe.
Mauvais calcul au final...
Mais de mon filtre, j'essaie aussi d'en ajuster les mailles. Les resserrer pour qu'il passe l'accessoire sous silence ; les agrandir pour qu'il m'autorise à verbaliser le reste, l'important qui pourrait jouer dans la relation.
En terme de difficulté, voilà qui est pire.
Parce que, sous le coup de l'émotion, j'ai du mal à séparer l'un de l'autre.
Parce qu'avant de trouver la bonne mesure - d'ailleurs toujours remise en cause -, il faut beaucoup tâtonner.
Trop large, mon filtre se change en passoire, me pousse à me perdre dans des discours sans intérêt ou des considérations juste bonnes à faire bâiller.
Trop serré, il se change en bonde de baignoire, me donne l'air de l'indifférence blasée, recevant bonnes et mauvaises nouvelles sans sourciller
. Mais non, je ne suis pas imperméable. Je me censure.

Le problème se complique encore quand les sentiments sont en jeu. Quand celui que j'aime et moi ne
mettons pas notre filtre au même endroit.
Nous en avons fait l'expérience il y a quelques semaines.

Je l'ai au téléphone, il ne semble pas en forme.
- Que se passe-t-il ? Tu veux en discuter ?
Silence. Puis il se décide à jouer la carte de la demi-opacité :
- Peut-être... Mais là, tu n'es pas la mieux placée.
Trop tard.
Soit on ne dit rien, soit on dit tout. Mais dire qu'on voudrait dire sans dire, impossible.
Après hésitations, la demi-opacité débouche sur la transparence : il a revu une fille avec laquelle il a eu une histoire. Avant de la croiser, il pensait que sa présence le laisserait de glace. Il s'était trompé, il est triste.
Moi, je l'écoute et mon cœur se pince.
Si je disais ça à l'homme que j'aime, a fortiori lorsqu'il est loin, il aurait en effet du souci à se faire. Cet aveu signerait mes doutes, le renverrait à ma confusion des sentiments. Lui sous-entendrait que sa place n'est peut-être plus auprès de moi, puisque moi, je pense, même un peu, à être ailleurs.

Il a compris sans que je n'ouvre la bouche. Et du coup, m'a expliqué que ce n'était pas ça du tout. Qu'aucun choix ne s'imposait, puisque cette histoire appartenait au passé. Mais qu'il en reste, cependant, la nostalgie des relations vite et mal terminées. De celles qu'on laisse derrière soi après un travail de deuil. Sauf que ce travail, il n'avait pas eu la possibilité de le faire, tant les événements s'étaient précipités dans sa vie.
Au début, j'ai eu de la peine à le suivre. Je pensais surtout que j'étais loin et elle, près. Que je ne le reverrais pas avant longtemps alors qu'elle, elle pouvait le voir chaque jour. Qu'il me connaissait peu et elle, bien davantage. Que s'il y avait une intimité plus facile à partager, à cultiver, c'était la leur et non la nôtre.
Puis je me suis forcée à l'écouter vraiment. Puis j'ai vraiment compris ce qu'il m'expliquait. En l'occurrence, que mes inquiétudes n'étaient pas fondées.
N'empêche... Sur le coup, j'ai eu mal.

Son filtre l'autorisait à me dire tout cela.
Le mien ne me l'aurait pas permis, sauf si des conséquences devaient en découler pour nous.
Notre perception n'était pas la même, nos réglages non plus.
Les accorder, au moins pour ne pas se heurter, cela réclame du temps.

 

 

Photo : Zoé Léonard. Dessin d'Enki Bilal.

Par Chut ! - Publié dans : Feu mon amour
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