Le blog de Chut !

Quand le réservoir d'essence fut vide, l'aiguille du compteur entra dans la zone rouge : celle de la réserve. Le carburant allait manquer, c'était une évidence. Seul restait l'espoir qu'il m'en resterait assez pour arriver au bout de la route.

Peu à peu, la réserve elle aussi s'était amenuisée. Mais la route, elle, ne s'était pas raccourcie. Au contraire, elle me semblait de plus en plus longue, escarpée, périlleuse. Un immense ruban de sable, hérissé de cailloux et de cactus, se déroulant à perte de vue sous un soleil de plomb.

À un moment, l'aiguille du compteur a chuté et s'est bloquée sur la gauche.
Game over
.
La réserve était épuisée. Plus de combustible à cramer, la panne sèche. Et sur la route, aucun point d'approvisionnement, bien sûr.
Hormis dans les films, il n'y a jamais de station-service en plein désert.

Alors je me mis à rêver, comme Lisbeth Salander de Millénium, d'un bidon d'essence et d'une allumette. Sans avoir encore tranché sur leur emploi.
Verserais-je le bidon dans le réservoir de la voiture en abandonnant l'allumette ?
Verserais-je le bidon sur les sièges de la voiture puis craquerais-je l'allumette en un ultime feu de joie ?
Ou bien me renverserais-je le bidon dessus pour devenir ma propre pyromane ?
Il fallait me décider. Et vite parce que sinon, j'allais crever là, lentement, sur cette foutue route.

J'ai regardé le bidon, j'ai regardé l'allumette. Il y eut comme un clic métallique au fond de mon cerveau.
Le mode Terminator s'était enclenché.
C'est un processus d'urgence, d'alerte rouge, non un mode de vie mais de survie. Le partage, le plaisir, la légèreté, l'insouciance, le rire... Tout ce qui fait le sel de l'existence lui est complètement étranger.
Dans ce mode-là, rien de tout cela n'existe. Et la pensée même que cela puisse exister est tout bonnement inconcevable.

Le mode Terminator est robotique, proche du végétatif. Il se résume aux besoins fondamentaux du corps, à un mode de communication ultra basique entre soi et soi, mais avec signaux brouillés : la douleur est tellement permanente, omniprésente qu'on ne sait ni d'où elle vient, ni comment la stopper.

Le mode Terminator oblige à penser, mais au niveau zéro de la connexion neuronale. Il faut par exemple penser à manger. Et une fois les aliments en bouche, penser à les mâcher.
Penser à dormir est en revanche inutile. Le sommeil et sa charge de cauchemars s'impose de lui-même.

Le mode Terminator est une hémorragie sans suture ni pansement. Une alternative entre le "m
arche ou crève !", mais sans la force de marcher.

Le mode Terminator est à lui seul une contradiction. Il faut puiser loin, très loin, dans ce qu'on n'a plus pour arracher de la substance au vide.
Plus qu'une prison, le mode Terminator est un enfer, mais un enfer qui donne tort au philosophe. Quand on est coincé entre l'être et le néant, l'enfer n'est pas les autres.
Du tout.
Les autres sont au contraire la voie pour en sortir. Et souvent, simplement la voix. Celle qui ne tient qu'à un fil : celui du téléphone.

Sans eux, et sans elle en particulier, je ne sais pas où je serais à présent.
Elle et son regard parfois si spécial dans lequel je vois d'autres yeux, très bleus. Je crois qu'elle le sait, comme elle sait que ce regard seul me donne à la fois envie de pleurer et de me battre.
Elle qui m'a recueillie, nourrie, écoutée, réconfortée - malmenée parfois :).
Elle à qui je n'ai pas les mots pour dire merci. Peut-être parce qu'aucun mot ne suffirait.
Elle grâce à qui je peux murmurer aujourd'hui "I'm back !" afin de le dire un peu plus fort demain.

I'm back, en attente de cicatriser.
Et que repousse la peau neuve par dessus les cicatrices.

Et que chaque matin renaissent mes deux poings...
Jeu 26 jun 2008 5 commentaires
J'ose? Je ne sais pas, je ne suis pas sûre... Bah, même si je ne suis pas "elle", rien ne m'empèche de m'excuser de t'avoir malmenée par moments un peu injustement. Je m'en veux de t'avoir utilisée comme déversoir à mon stress...
ether - le 26/06/2008 à 10h44
Euh... Tu en doutes ? La faute à ma façon trop allusive d'écrire, parce que OUI, évidemment, c'est bien toi : ether, coupine, et au moins deux autres noms (tu as remarqué que ça commence à faire du monde ?...  chez toi comme chez moi, on est décidément plusieurs !). Alors, encore, et du fond du coeur, un immense MERCI. Pour le reste, on n'en parle plus : on srait stressée à moins, vu ce que tu vis en ce moment !
Des millions de bises, coupine.
Chut !
Nan...rien à voir avec ta façon d'écrire. Plutôt à voir avec moi et mon impression de ne rien avoir fait de si spécial que ça. Je pensais que c'était moi pour ce qui est du regard, de celle que tu y vois parfois; et que je sens aussi dans ces moments là. Mais si ça t'a aidé à aller mieux, youpii!! Et pis, mici pour la tolérance coupine!
ether - le 26/06/2008 à 14h35
On attend tous, je pense, ton "i'm back". Sincèrement.
Stannis - le 05/07/2008 à 13h07
Des bises pour toi, cher complice de Sainte Marguerite (cette réponse est codée :) )...
Chut !
Ce n'est sans doute pas le lieu mais Millenium c'est comment ? J'en entends beaucoup parler... Sinon j'adore ton style, comme toujours :)
Envers du d�cor - le 06/07/2008 à 23h43
J'aime ta phase "I'm back" ma joulie coupinette. J'avoue que parfois je ne savais pas comment faire le pas vers toi et même que je me cachais derière une apparente aisance ou sociabilité limite ingénue car je pensais, le peu de fois où je t'avais au tel, qu'il t'était important de sentir de la joie dans la voix de ce que tu avais au bout du fil. Je ne te l'ai pas assez dit même à Ether d'ailleurs, mais je t'aime très fort et je regrette simplement de n'avoir pas eu la force de concrétiser ma présence morale par ces 200m à parcourir pour arriver à toi. J'taime madame ma voisine de quartier, comme une grande soeur. Bisous soeurette... P.S: je suis contente que tu aies lu Les millenium...je pensais naïvement que je ne t'en avais pas suffisemment bien parlé la dernière fois!
phenycia - le 27/07/2008 à 02h13
Coucou, jolie miss' ! Très difficile de réagir devant la douleur des autres, même lorsqu'on s'aime beaucoup mais qu'on n'est pas si proches, finalement (et même en étant proches, cela reste très compliqué !). Ne t'inquiète pas, je sais que tu as un cœur gros comme ça...  et qu'on va sûrement bientôt se voir chez toi, non à 200 mètres mais à euh... des centaines de kilomètres. Cherchez l'erreur ? Non, il n'y en a pas. Alors, en attendant, des centaines de bises pour ma voisine.
Chut !