Le blog de Chut !
Je me souviens à peine de l'histoire. Juste que le personnage principal est un gynécologue, employé dans une clinique spécialisée, qui "fait don" de son sperme aux femmes dites stériles. Que les
enfants qui naissent de leur étreinte ont tous le nez de leur papa, c'est même à cela qu'on les reconnaît.
En revanche, je me souviens très bien des circonstances : la bibliothèque du lycée, sous les combles, dans une fin d'après-midi de printemps. Le rayon de soleil qui embrase les rangées de des
bouquins. La poussière qui vole, la douceur de l'air, mon doigt qui effleure les tranches des livres. J'emprunterai les yeux fermés celui sur lequel il s'arrêtera, même s'il ne me plaît pas.
Ça a été ce livre-là. J'ai rempli la petite fiche qui me donnait le droit de l'emporter à la maison. J'ai commencé à le lire, davantage par obligation envers moi-même que par envie.
C'était le pacte.
Dès le premier chapitre, j'ai senti que je basculais dans une contrée inconnue. Un territoire s'ouvrait à moi. Celui du mot et de la phrase justes, mais surtout de l'émotion, de la grâce. De la
littérature, pour parler grandiloquent. J'y ai fait mes études et mon nid, mais rarement j'ai retrouvé cet embrasement du début.
La même sensation m'a prise à la gorge en voyant ado, au ciné, Les Ailes du désir.
Je n'ai relu ni revu ni l'un ni l'autre. Sauf pour le sexe, je préfère les premières fois.