Le blog de Chut !
À 22, 23 ans, pas davantage, je rencontrai Nathan dans le café que je fréquentais.
Je me souviens, c'était en plein mois d'août. Un brusque refroidissement glaçait l'été, me contraignant à ressortir les collants.
- Il n'y a vraiment plus de saison ! plaisanta-t-il en reluquant mes jambes.
Sur le champ, je le soupçonnai de se ficher du climat, tant qu'il permet aux femmes de dévoiler leurs attributs.
Sur le champ, son aplomb me titilla.
Sur le champ, je voulus en faire mon amant.
Notre premier rendez-vous eut lieu chez moi. Je l'y invitai, persuadée de ne gêner personne : ma colocataire était absente, les voisins sûrement partis en vacances. Je pouvais donc crier tout mon soul sans crainte d'ameuter quiconque.
J'avais préjugé de Nathan - ou de moi-même. Erreur de jeunesse que de croire à la virilité affichée - ou à ma capacité à m'abandonner.
J'attendais un Don Juan qui saurait par son expérience abolir mes résistances. Ou, selon l'expression consacrée, me "faire grimper aux rideaux". Je trouvai un homme certes endurant et motivé, mais impuissant à me faire dépasser le premier carreau de ma porte-fenêtre.
De notre nuit, je me souviens surtout des croissants qu'il ramena à midi passé. Nous les partageâmes à même le sommier, pile à l'endroit de nos ébats. Je devais m'en souvenir le soir, peinant à trouver le sommeil à cause des miettes rassises.
Le deuxième rendez-vous eut lieu sur son territoire. Je ne percevais pas encore la différence, elle allait être de taille. Le seul point commun : lui aussi vivait en coloc, avec un coturne pointant aux abonnés absents. Si je poussais plus loin l'analogie, Nathan avait fait le même calcul que moi.
Le reste fut cependant sans commune mesure.
Dans mon appartement, il m'avait patiemment effeuillée et bécotée. Dans sa chambre, il me défeuilla et m'embrassa à la va-vite. À peine sa bouche eut-elle effleuré mon cou qu'il me glissa :
- J'ai une surprise pour toi.
Je me récriai. Une surprise ? Pour moi ? C'était trop tôt, trop prévenant, trop gentil. Trop tout court.
Nathan me gratifia d'un sourire ambigu.
- Non, non, ce n'est pas trop. Attends de la voir !
Je ne demandais que ça, tiens. Et quelle ne fut pas ma surprise lorsqu'il jaillit du lit, nu, pour tirer une grosse malle au milieu de la pièce.
Il l'ouvrit pour en extraire un à un ses trésors : une guêpière en vinyle, un godemiché vibrant, une cagoule en cuir, une badine, des pinces à seins, des poids à y attacher...
J'en restai sans voix.
Cette nuit-là, nous avons testé certains de ces accessoires. J'avais du mal à me laisser aller, ils étaient tous nouveaux pour moi. Nathan m'encourageait, m'exhortait à me regarder dans le miroir judicieusement placé.
Je résistais.
D'un côté, je trouvais mon équipement très excitant. De l'autre, harnachée telle une jument de labour, je me sentais ridicule. Pour un peu, j'avais la sensation de tourner un mauvais film porno... s'il en existe de bons.
Sans mauvais jeu de mots, je n'étais pas totalement dedans.
L'aube se profilait entre les volets. Blottis l'un contre l'autre, nous dérivions dans le grand lit.
- Cette malle, je ne l'avais jamais ouverte pour personne... m'a affirmé Nathan.
Je posais alors la question qui me brûlait les lèvres :
- Pourquoi moi ?
- Parce que je savais que tu ne serais pas choquée... que tu l'accepterais... que ça te plairait...
J'ai gardé le silence.
Qui ne dit mot consent. Nathan (m') avait touché(e) juste.
Je suis rentrée chez moi, le corps et l'esprit en vrac. Ma colocataire était là. M'a dévisagée d'un œil acéré. Je me forçais à prendre l'air de rien, ne pouvais briller que d'un éclat suspect. Je tentais de le contenir, mon visage me trahissait.
- Tu as passé une bonne nuit, on dirait ?
Oui, tout compte fait, j'avais passé une bonne nuit. Une excellente, même. Une perturbante, sans précédent. Mais je savais d'instinct, tout comme Nathan savait pour moi, qu'elle ne me comprendrait pas. Me traiterait in petto de pauvre fille, de perverse, de malade, de désaxée. Bref, de tous ces termes commodes qui désignent ce qui nous est étranger.
J'ai esquivé sa curiosité, me suis enfermée dans ma chambre. J'ai repassé avec honte et délice les images de nos corps enchevêtrés.
J'ai voulu les sceller sous une chape de plomb. Mais alors qu'elle coulait sur mes souvenirs, je savais, d'instinct encore, qu'elle n'était pas étanche.
La malle de Nathan était ma boîte de Pandore. Tôt ou tard, je l'ouvrirais à mon tour pour l'explorer, éclairer l'ombre de ses recoins.
Ce n'était qu'une question de temps.
Ça m'a pris dix longues années.
Je me souviens, c'était en plein mois d'août. Un brusque refroidissement glaçait l'été, me contraignant à ressortir les collants.
- Il n'y a vraiment plus de saison ! plaisanta-t-il en reluquant mes jambes.
Sur le champ, je le soupçonnai de se ficher du climat, tant qu'il permet aux femmes de dévoiler leurs attributs.
Sur le champ, son aplomb me titilla.
Sur le champ, je voulus en faire mon amant.
Notre premier rendez-vous eut lieu chez moi. Je l'y invitai, persuadée de ne gêner personne : ma colocataire était absente, les voisins sûrement partis en vacances. Je pouvais donc crier tout mon soul sans crainte d'ameuter quiconque.
J'avais préjugé de Nathan - ou de moi-même. Erreur de jeunesse que de croire à la virilité affichée - ou à ma capacité à m'abandonner.
J'attendais un Don Juan qui saurait par son expérience abolir mes résistances. Ou, selon l'expression consacrée, me "faire grimper aux rideaux". Je trouvai un homme certes endurant et motivé, mais impuissant à me faire dépasser le premier carreau de ma porte-fenêtre.
De notre nuit, je me souviens surtout des croissants qu'il ramena à midi passé. Nous les partageâmes à même le sommier, pile à l'endroit de nos ébats. Je devais m'en souvenir le soir, peinant à trouver le sommeil à cause des miettes rassises.
Le deuxième rendez-vous eut lieu sur son territoire. Je ne percevais pas encore la différence, elle allait être de taille. Le seul point commun : lui aussi vivait en coloc, avec un coturne pointant aux abonnés absents. Si je poussais plus loin l'analogie, Nathan avait fait le même calcul que moi.
Le reste fut cependant sans commune mesure.
Dans mon appartement, il m'avait patiemment effeuillée et bécotée. Dans sa chambre, il me défeuilla et m'embrassa à la va-vite. À peine sa bouche eut-elle effleuré mon cou qu'il me glissa :
- J'ai une surprise pour toi.
Je me récriai. Une surprise ? Pour moi ? C'était trop tôt, trop prévenant, trop gentil. Trop tout court.
Nathan me gratifia d'un sourire ambigu.
- Non, non, ce n'est pas trop. Attends de la voir !
Je ne demandais que ça, tiens. Et quelle ne fut pas ma surprise lorsqu'il jaillit du lit, nu, pour tirer une grosse malle au milieu de la pièce.
Il l'ouvrit pour en extraire un à un ses trésors : une guêpière en vinyle, un godemiché vibrant, une cagoule en cuir, une badine, des pinces à seins, des poids à y attacher...
J'en restai sans voix.
Cette nuit-là, nous avons testé certains de ces accessoires. J'avais du mal à me laisser aller, ils étaient tous nouveaux pour moi. Nathan m'encourageait, m'exhortait à me regarder dans le miroir judicieusement placé.
Je résistais.
D'un côté, je trouvais mon équipement très excitant. De l'autre, harnachée telle une jument de labour, je me sentais ridicule. Pour un peu, j'avais la sensation de tourner un mauvais film porno... s'il en existe de bons.
Sans mauvais jeu de mots, je n'étais pas totalement dedans.
L'aube se profilait entre les volets. Blottis l'un contre l'autre, nous dérivions dans le grand lit.
- Cette malle, je ne l'avais jamais ouverte pour personne... m'a affirmé Nathan.
Je posais alors la question qui me brûlait les lèvres :
- Pourquoi moi ?
- Parce que je savais que tu ne serais pas choquée... que tu l'accepterais... que ça te plairait...
J'ai gardé le silence.
Qui ne dit mot consent. Nathan (m') avait touché(e) juste.
Je suis rentrée chez moi, le corps et l'esprit en vrac. Ma colocataire était là. M'a dévisagée d'un œil acéré. Je me forçais à prendre l'air de rien, ne pouvais briller que d'un éclat suspect. Je tentais de le contenir, mon visage me trahissait.
- Tu as passé une bonne nuit, on dirait ?
Oui, tout compte fait, j'avais passé une bonne nuit. Une excellente, même. Une perturbante, sans précédent. Mais je savais d'instinct, tout comme Nathan savait pour moi, qu'elle ne me comprendrait pas. Me traiterait in petto de pauvre fille, de perverse, de malade, de désaxée. Bref, de tous ces termes commodes qui désignent ce qui nous est étranger.
J'ai esquivé sa curiosité, me suis enfermée dans ma chambre. J'ai repassé avec honte et délice les images de nos corps enchevêtrés.
J'ai voulu les sceller sous une chape de plomb. Mais alors qu'elle coulait sur mes souvenirs, je savais, d'instinct encore, qu'elle n'était pas étanche.
La malle de Nathan était ma boîte de Pandore. Tôt ou tard, je l'ouvrirais à mon tour pour l'explorer, éclairer l'ombre de ses recoins.
Ce n'était qu'une question de temps.
Ça m'a pris dix longues années.
Jeu 27 déc 2007
1 commentaire
La boite à pandore ou le passeur, la malle et l'ingénue ....
Trekker - le 28/12/2007 à 03h47
J'en connais qui se serait fait la malle tout court...
Chut !